Après les massacres, la justice contre-attaque
Au lendemain des sanglants massacres qui ont endeuillé la région du Plateau au Nigeria, les autorités ont procédé à de multiples arrestations. Il s’agit de punir les coupables, chrétiens comme musulmans, qui ont pris part aux tueries intercommunautaires du centre du pays.
Quelque 300 musulmans tués en janvier, des villages entiers de chrétiens massacrés en mars… Devant la recrudescence des conflits ethnico-religieux, les autorités nigérianes veulent désormais sévir. La police a annoncé, dimanche 21 mars, avoir arrêté pas moins de 164 personnes, parmi lesquelles deux seront des témoins de l’accusation. La justice a engagé des poursuites contre 41 personnes pour "terrorisme" et "homicide" et poursuivra les 121 autres pour détention illégale d’armes, révolte, incendie… Au Nigeria, l’homicide est passible de la peine de mort et le terrorisme de la détention à perpétuité. Les autorités entendent s’attaquer aux "racines du mal", c’est-à-dire à la folie meurtrière qui s’est emparée du centre du pays, la région du Plateau et, plus précisément, les abords de la localité de Jos.
Début mars, trois villages ont été pris d’assaut, et des centaines de villageois, des chrétiens pour la plupart, ont été abattus. Les responsables présumés: des éleveurs fulani -c’est à dire peuls- de confession musulmane, et armés de machettes. "Dans le but d’en finir définitivement avec les auteurs des violences, la police nigériane a mené son enquête sur les meurtres collectifs des villages chrétiens de Dogo Nahawa, Rasat et Jegi qui se sont déroulés le 7 mars 2010", indique un communiqué. Vraisemblablement, ces attaques ont eu lieu en représailles au massacre de plus de 300 musulmans par des chrétiens en janvier dernier. Depuis 2001, les violences dans la région de Jos ont déjà fait des milliers de morts.
Besoin de gouvernance
Pressées par Washington de punir les coupables de ces règlements de comptes communautaires, les autorités nigérianes veulent envoyer un signal fort à la communauté internationale et faire montre de leur détermination. La police a déjà précisé avoir recueilli des preuves contre 162 personnes dans le cadre de l’enquête judiciaire. Après la vague de violences, le 12 mars, l’ambassade américaine au Nigeria avait appelé les autorités d’Abuja à se pencher sérieusement sur les causes de la violence endémique dans l’Etat du Plateau. "Les problèmes sous-jacents – défis économiques, tensions ethniques, besoin d’une bonne gouvernance – qui provoquent ces violences récurrentes doivent être traités de manière approfondie", précise le communiqué de Washington. La secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton a appelé les Nigérians à la retenue et demandé que les coupables soient déférés devant la justice.
La réactivation des conflits ethnico-religieux intervient à un moment délicat, alors que le pays – historiquement partagé entre un Nord majoritairement musulman et un Sud principalement chrétien et animiste – est plongé dans l’incertitude politique. Son président, Umaru Yar’Adua, un musulman du Nord, est malade depuis des mois. Après une longue convalescence en Arabie Saoudite, il vient tout juste de rentrer au pays. Il est, depuis, resté invisible et la gestion des affaires a été confiée au vice-président, Goodluck Jonathan. Devenu président du pays par intérim, celui-ci – un chrétien du Sud – a récemment dissous le gouvernement. Des négociations sont toujours en cours pour en constituer un nouveau. (avec AFP)
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