Mba Obame, victime d’un coup d’Etat imaginaire
Pour des propos tenus dans la presse française, l’opposant gabonais André Mba Obame a été mis en garde par le pouvoir. Après un moment d’hésitation, l’Union nationale (oppostion) dénonce quant à elle une « polémique stérile » et tente de désamorcer la crise.
L’opposition gabonaise, réunie au sein du nouveau parti de l’Union nationale (UN), a défendu jeudi 18 mars les propos controversés tenus dans la presse française par l’un de ses responsables, André Mba Obame. Dans une interview accordée à l’hebdomadaire français L’Express, le 11 mars dernier, celui-ci déclarait : "Le mécontentement est général. (…) Si ça continue comme ça, on va au coup d’Etat avant la fin de l’année. Un coup d’Etat à la nigérienne. Voilà peu, plus de 300 militaires ont donné 24 heures au gouvernement pour que leur soit enfin versée la solde due. Et ils ont obtenu gain de cause".
Il n’en fallait pas plus à l’entourage du président Ali Bongo Ondimba (ABO) pour conclure – sans doute un peu rapidement – que les opposants préparaient un coup d’Etat dans l’année. A l’image de ce qui s’est passé au Niger, où l’armée a déposé le 18 février le président Mamadou Tandja après plusieurs mois de crise politique, sans que la communauté internationale ne proteste de manière véhémente.
L’UN, qui a beaucoup hésité avant d’adopter une position officielle, a finalement qualifié la polémique soulevée par l’entourage présidentiel de "stérile". "Depuis quelques jours, une polémique est née et enfle – plus que de raison – à la suite de l’interview que le secrétaire exécutif de l’Union nationale, André Mba Obame, a accordée à l’hebdomadaire français L’Express", soutient le parti dans une déclaration lue par son vice-président, Pierre-Claver Zeng-Ebome, à la télévision publique RTG1. "Le secrétaire exécutif a dit son sentiment sur certains aspects de la politique française au Gabon et sur la politique intérieure gabonaise", a-t-il poursuivi. "L’on ne peut tirer de tels propos la conclusion que (lui) ou son parti projettent de perpétrer un coup d’Etat" au Gabon.
"Grave et tendancieux"
"L’Union nationale, qui tient à la vie de chaque Gabonais, n’a pas de temps pour la polémique stérile", a conclu Pierre-Claver Zeng-Ebome, appelant l’opposition à continuer d’oeuvrer "en vue de parvenir à l’alternance au pouvoir par les voies démocratiques et pacifiques". André Mba Obame, ex-ministre de l’Intérieur est arrivé en 2e position à la dernière présidentielle, recueillant plus de 25 % des suffrages. Mais la question de savoir s’il peut désormais rentrer au Gabon sans se faire arrêter par les autorités est posée. L’armée, en tout cas, a tenu à rappeler sa non-implication dans le débat politique.
Le ministère gabonais de la Défense a affirmé, dans un communiqué publié jeudi, la "stricte neutralité" de ses hommes, et rejeté une "démarche antidémocratique et contraire à l’éthique militaire, tendant à un coup de force par des hommes politiques" . "Nous mettons en garde contre toute personne qui troublerait l’ordre public, la rendons responsable devant l’opinion nationale et internationale des conséquences qui pourraient en découler et appelons tous les militaires à la vigilance", ajoutait le texte.
L’autre parti d’opposition, l’Union du peuple gabonais (UPG), parti de l’opposant historique Pierre Mamboundou arrivé en 3e position à la présidentielle, a défendu la liberté d’André Mba Obame et de l’ensemble de l’opposition "de critiquer les actions qu’elle juge inappropriées" pour le pays, dans des propos rapportés par le quotidien L’Union.
Le pouvoir avait vivement condamné les propos d’André Mba Obame. La semaine dernière, le gouvernement les a qualifiés de "graves et particulièrement tendancieux", en mettant en garde contre "toute atteinte à la sécurité" du Gabon et de ses habitants. Depuis, André Mba Obamé reste en France. Attendant sans doute que la polémique se dégonfle, il a remis son retour au Gabon a une date indeterminée. (avec AFP)
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