Droits des femmes : une si longue liste de violations
Souhayr Belhassen, présidente de la FIDH, explique pourquoi la liste des entraves aux droits des femmes est longue. Il y a un an, la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) lançait la campagne « L’Afrique pour le droit des femmes – Ratifier et respecter ! » Depuis, un intense travail d’enquête a été accompli, publié ce 8 mars – journée internationale des droits des femmes – sous la forme d’un « Cahier d’exigences » adressé aux gouvernements.
Officialisée en 1977 par l’ONU, la journée internationale des droits des femmes est célébrée ce 8 mars. L’occasion pour la FIDH de communiquer sur une action inédite qu’elle a lancée il y a un an, en mobilisant l’ensemble de ses ligues nationales et cinq organisations régionales(*), soit une centaine d’associations dans plus de 40 pays du continent. Les travaux menés aboutissent aujourd’hui à la publication d’un « Cahier d’exigences » : des fiches qui scrutent, pour 31 pays du continent, l’état des droits des femmes, leurs principales violations ainsi que les avancées les plus importantes, tout en présentant des recommandations chiffrées.
Seuls trois États ont adopté une législation garantissant une véritable égalité entre les sexes : l’Afrique du Sud, le Bénin et le Cap-Vert. Comme pour prouver qu’il ne suffit pas de légiférer, le rapport de la FIDH révèle que, malgré le caractère progressiste de son corpus juridique, l’Afrique du Sud enregistre le plus grand nombre de viols au monde. Autres faits marquants: 96 % des Guinéennes, mais aussi 93 % des Djiboutiennes ont subi une forme de mutilation génitale, tandis que 71 % des Maliennes et plus de 30 % des Ivoiriennes se sont mariées avant l’âge de 18 ans. Parmi les points positifs, il faut toutefois noter que le Rwanda détient le record mondial du plus fort taux de femmes au Parlement (56 %), suivi par l’Afrique du Sud (44,5 %, 3e rang mondial). Mais le Congo (9,2 %), l’Algérie (7,05 %) et le Tchad (5,2 %) sont en queue de peloton.
"Dès qu’on touche aux droits des femmes, on touche au coeur de la société"
L’état des lieux dressé par la FIDH permet de formuler des revendications ciblées pour chaque pays, telles que la nécessité de criminaliser des violences sexuelles, ou d’abroger des lois consacrant le statut inférieur de la femme dans la famille et l’empêchant, entre autres, d’accéder à la propriété… La liste est longue. « Dès qu’on touche aux droits des femmes, on touche au cœur de la société, rappelle Souhayr Belhassen, la présidente de la FIDH (voir son interview vidéo ci-dessous). Les hommes perçoivent cela comme une déstabilisation sociale et, donc, une perte de pouvoir. »
L’objectif de l’initiative de la FIDH est clair : mettre les États face à leurs responsabilités pour que les textes – qu’ils ont pour la plupart ratifiés – de la Convention de l’ONU et du Protocole de l’Union Africaine sur les droits des femmes soient appliqués et intégrés dans les législations nationales. Depuis son lancement, la campagne de la FIDH a accompagné des avancées. Le Burkina Faso, par exemple, a adopté une loi instaurant un quota de 30 % de femmes sur les listes de candidats des partis politiques, tandis que l’Ouganda a commencé à appliquer une loi contre les mutilations génitales féminines.
(*) Femmes, droits et développement en Afrique (Wildaf/Feddaf ), Femmes Africa solidarité (FAS), Women’s Aid Collective (Wacol), Women and Law in South Africa (WLSA), Centre africain pour la démocratie et les études des droits de l’homme (ACDHRS).
La campagne est notamment parrainée par les prix Nobel de la paix Desmond Tutu et Shirin Ebadi, les prix Nobel de littérature Wolé Soyinka et Nadine Gordimer, ainsi que par de nombreux artistes dont Youssou N’Dour, Tiken Jah Fakoly, Angélique Kidjo, Salif Keita, Rachid Taha… Voir le blog de la campagne ici.
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