Moussa Alassane Diallo, PDG de la BNDA : « La production céréalière est une priorité »

La crise alimentaire a modifié la stratégie de la banque qui a revu ses priorités © AFP

La crise alimentaire a modifié la stratégie de la banque qui a revu ses priorités © AFP

Publié le 3 mars 2010 Lecture : 4 minutes.

En 2011, la Banque nationale de développement agricole du Mali (BNDA) aura trente ans. Lors de sa création, la mission première de cette Société d’économie mixte (SEM) était d’« apporter son concours technique et financier à la réalisation de tout projet de manière à promouvoir le développement rural ». Aujourd’hui, elle est devenue une banque universelle. Même si, à l’image du Crédit agricole en France – un modèle pour son le PDG de la BNDA, Moussa Alassane Diallo – le cœur du métier de la BNDA demeure le financement de l’agriculture. La banque, qui compte dans son actionnariat l’Etat malien, la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), l’Agence française de développement (AFD), la Société allemande d’investissement et de développement (DEG, coopération allemande) est le premier partenaire financier du monde rural au Mali. Son chiffre d’affaires est de 150 milliards de FCFA par an (environ 227 millions d’euros). Entretien avec son PDG.

Jeuneafrique.com : Dans quels domaines intervient principalement la BNDA ?
Moussa Alassane Diallo : La BNDA accorde en premier lieu des crédits à court terme, essentiellement à des coopératives, pour l’achat d’intrants agricoles (engrais, insecticides, herbicides, etc) ou pour le développement de leur secteur commercial. La BNDA accorde également des crédits à moyen terme, pour financer l’achat d’équipements agricoles (charrues, tracteurs, etc) ou la construction d’infrastructures rurales (magasins de stockage, centres d’alphabétisation ou de santé, pistes rurales, etc). Ce sont les deux principaux pôles de financement de la banque. Et plus récemment, nous avons entrepris de financer des aménagements dans la zone de l’Office du Niger : il s’agit de crédits à plus long terme, accordés à des villages.

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Quels sont les secteurs agricoles les plus financés par la banque ?
Le coton et le riz. Malgré la crise, la BNDA a toujours financé la filière cotonnière. Il s’agit d’un secteur économique important au Mali, c’est donc pour nous une priorité. La zone cotonnière concerne 3 millions de Maliens. Et elle ne se résume pas qu’au coton : on y trouve aussi des cultures de céréales sèches, comme le mil, le maïs, le sorgho…

En moyenne, quel est le montant des crédits accordés ?
La moyenne du montant d’un prêt tourne entre 5 et 6 millions FCFA par dossier. Le crédit s’échelonne sur une durée de douze mois s’il s’agit d’intrants et de 4 à 5 ans pour des équipements agricoles.

La crise alimentaire de 2008 vous a-t-elle poussé à modifier votre stratégie ?
Oui. Nous avons fait du financement de la production céréalière une priorité, ce qui n’était pas le cas avant. Nous attachons plus d’importance notamment aux cultures du riz et du blé.

La difficulté d’accès au crédit est l’un des freins au développement du secteur agricole en Afrique. Pourquoi ?
Les contraintes liées à l’agriculture ne relèvent pas de celles, classiques, auxquelles est confronté un banquier. Nous travaillons avec une clientèle rurale, pas ou peu alphabétisée, très dispersée, qui ne maîtrise pas les outils de gestion. Bref, nous sommes essentiellement dans le secteur informel. Aucune banque ne peut prêter de l’argent à cette clientèle ! Il faut ajouter le problème des aléas climatiques. En dehors de l’Office du Niger, où l’exploitation de l’eau est maîtrisée, l’agriculture est soumise dans le Sahel à des conditions difficiles : sècheresse, inondations, feux de brousse, attaques de criquets… Des aléas qui surviennent une année sur deux ou sur trois. Il y a aussi la question de la commercialisation, très floue : en dehors du coton, au Mali, le banquier n’a quasiment aucune donnée fiable sur les recettes. Enfin, le défaut d’assurance, notamment au niveau des aléas climatiques, ne favorise pas l’obtention de crédits.

Cela signifie-t-il qu’une banque qui finance l’agriculture n’est pas viable ?

Non. La BNDA est viable. Nous avons connu des difficultés, notamment lors de la crise de la filière coton qui a fait peser un risque majeur sur la banque. Mais aujourd’hui, elle connaît une excellente situation financière, notamment grâce à la diversification de ses activités. Ce n’est pas simple car nous devons assumer une mission de service public tout en veillant à la rentabilité de la banque. Cela résume bien la situation de l’agriculture en Afrique : comment assurer une mission de service public tout en étant rentable ?

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Quid des banques commerciales généralistes ? Financent-elles elles aussi des projets agricoles ou vous laissent-elles ce risque ?
Elles interviennent également, dans deux secteurs majeurs : le financement des intrants agricoles via un pool de banques, dont la BNDA, et le financement de la commercialisation du coton, secteur dont la BDM [Banque de développement du Mali, ndlr] est le moteur. Elles interviennent aussi dans la commercialisation des céréales.

Retrouver notre dossier spécial sur la sécurité alimentaire dans le numéro 2564 de Jeune Afrique en kiosques du 28 février au 6 mars
 

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