Sarkozy à Kigali pour une réconciliation historique
Nicolas Sarkozy est arrivé à Kigali ce matin (8h30 GMT). C’est la première fois depuis le génocide de 1994 qu’un président français se rend officiellement au Rwanda. Enjeux d’une visite historique.
Nicolas Sarkozy n’est pas à une contradiction près. C’est un opposant déclaré de toute « repentance » de la France pour ses crimes passés. Mais c’est aussi sous sa présidence que les relations diplomatiques ont été rétablies le 29 novembre dernier avec le Rwanda, après trois ans d’interruption, alors que le rôle présumé de la France dans le génocide avait fait couler beaucoup d’encre dans ce pays.
« Tourner la page »
C’est la première visite d’un président français au Rwanda depuis 25 ans et, surtout, la première depuis le génocide de 1994. Le discours de Sarkozy est donc très attendu. Mais sa relation ambigüe à l’Histoire le place dans une situation assez inconfortable : chaque mot qu’il va prononcer sur le génocide et sur le rôle de la France va immanquablement être guetté, interprété et décortiqué par ses hôtes avec une attention toute particulière…
Pendant sa visite (de quelques heures seulement), le président fraçais doit déposer une gerbe au Mémorial du génocide et s’entretenir avec Paul Kagamé, le président rwandais et dirigeant historique du Front patriotique rwandais (FPR), la rébellion tutsie qui a fait tomber le régime de Juvénal Habyarimana, grand ami de la France.
L’entourage de Nicolas Sarkozy ne fait pas mystère des objectifs de cette visite : il s’agit de « tourner la page », après trois années de rupture diplomatique entre Paris et Kigali. Les relations entre les deux pays avaient été rompues par le Rwanda après l’émission de neuf mandats d’arrêt par un juge d’instruction anti-terroriste, Jean-Louis Bruguière, à l’encontre de proches de Paul Kagamé.
Kigali se rapproche du monde anglophone
Membre du même parti politique que le président français, Jean-Louis Bruguière soupçonnait Kagamé d’être à l’origine de l’attentat contre l’avion présidentiel d’Habyarimana, qui avait causé la mort de ce dernier et marqué le début du génocide.
Pendant ces trois années, Kigali s’est beaucoup rapproché du monde anglo-saxon. Le Rwanda entretient une relation cordiale avec Washington, privilégie désormais l’enseignement de l’anglais au détriment du français dans ses écoles, et vient d’adhérer au Commonwealth, ce club regroupant essentiellement d’anciennes colonies britanniques.
Autant de signes qui peuvent être interprétés comme une défiance vis-à-vis de Paris. Grâce à l’action du ministre français des Affaires Etrangères Bernard Kouchner – ami de Paul Kagamé et critique envers le rôle de la France au Rwanda au début des années 1990 – et à la reprise de l’enquête du juge Bruguière par un autre magistrat, Marc Trévidic, les relations entre les deux pays se sont apaisées, jusqu’au rétablissement récent des relations diplomatiques.
Mais pour que de vraies relations cordiales soient renouées entre les deux pays, Kigali attend plus de Paris, et notamment une déclaration de repentance française. Sarkozy, par principe opposé à cette démarche, pourrait cependant faire un grand pas dans cette direction aujourd’hui. A condition qu’il sache trouver les mots justes.
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