Probo Koala : les victimes enfin indemnisées ?

Le cabinet d’avocat anglais Leigh Day and Co. et Claude Gohourou, qui se disputaient la gestion de l’argent versé aux victimes du Probo Koala, ont finalement conclu un accord jeudi 11 février. Ils doivent désormais mener conjointement les indemnisations.

Le Probo Koala dans le port de Tallin, le 27 septembre 2006 © AFP

Le Probo Koala dans le port de Tallin, le 27 septembre 2006 © AFP

ProfilAuteur_PierreBoisselet

Publié le 17 février 2010 Lecture : 3 minutes.

Mise à jour le jeudi 18 février à 16h48

C’est une lutte à couteaux tirés qui vient de s’achever. Après avoir multiplié les actions en justice, le cabinet d’avocat anglais Leigh Day and Co. (LD&C) et la Coordination nationale des victimes des déchets toxiques de Côte d’Ivoire (CNVDT-CI), présidée par Claude Gohourou, viennent de trouver un terrain d’entente.

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Accord surprenant

Les deux organisations, qui se traitaient jusque-là de noms d’oiseaux, ont signé un accord pour procéder conjointement à la distribution des indemnités des 30 000 victimes reconnues du Probo Koala, dont les déchets toxiques avaient été déversés dans la zone d’Abidjan en 2006.

La gestion de ces quelque 22,5 milliards de F CFA (33 millions d’euros environ) avait été initialement obtenue par LD&C pour le compte des victimes, après des années de négociation avec la multinationale Trafigura (l’affréteur du tanker à l’origine des pollutions du Probo Koala). L’accord avait été avalisé par la justice anglaise, mais à la suite du transfert des fonds en Côte d’Ivoire, Claude Gohourou, qui se présentait comme le représentant des associations de victime, avait porté plainte devant la justice ivoirienne.

Il souhaitait procéder lui-même au versement des sommes et réclamait leur transfert sur le compte de son association, la CNVDT. Si LD&C reconnaissait alors avoir travaillé avec lui, le cabinet était formel : selon lui, il s’agissait d’un opportuniste qui ne représentait pas l’ensemble des victimes.

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En première instance, la justice ivoirienne avait décidé le séquestre des fonds, puis, en appel, leur versement à la CNVDT, déclenchant l’ire du cabinet anglais. LD&C s’était alors déclaré persuadé que Gohourou disposait de complicités parmi les autorités ivoiriennes.

La Cour suprême a ensuite décrêté d’un nouveau blocage des fonds.

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"Seul moyen pour conserver un contrôle"

C’est cette situation, apparemment inextricable, qui a poussé LD&C a conclure un accord avec son ancien adversaire. "Compte tenu des circonstances, des décisions de justice et des conseils de nos avocats sur place, il nous est apparu qu’une négociation avec M. Gohourou était le seul moyen que nous avions de contrôler en partie la distribution des sommes", a expliqué Pauline Kahn, juriste pour LD&C, à jeuneafrique.com.

Si LD&C maintient ses accusations de tentative d’usurpation de la part de Claude Gohourou, toutes les actions en justice entre les deux parties doivent cesser à l’issue des distributions d’argent, en vertu de leur accord.

La procédure de distribution des fonds retenue est par ailleurs particulièrement complexe. Les victimes des pollutions auront d’abord un délai de 21 jours pour retirer un chèque après une vérification de leur identité conjointe des représentants de LD&C et de la CNVDT-CI.

"Puis, précise Pauline Kahn, ils auront quatre dimanches pour échanger leur chèque contre les espèces" (750 000 CFA par personne soit 1150 euros environ).

Dans les cas où ce délai sera dépassé, les sommes seront reversées à la CNVDT-CI qui sera chargée de les distribuer. 

"Extrêmement troublant"

Ce dispositif inquiète les ONG, qui suivent l’affaire de près. "Il est extrêmement troublant que les avocats des victimes aient été contraints de conclure un accord avec une organisation dont la prétention à représenter 30 000 victimes est de toute évidence frauduleuse", a réagit Amnesty International dans un communiqué.

L’organisation craint "que les fonds ne soient pas alloués dans le délai imparti et que la CNVDT-CI finisse par partir de toutes les façons avec l’argent" et s’inquiète de possible vols lors de la remise des espèces.

"C’est vrai qu’un problème de sécurité peut se poser, reconnaît Pauline Kahn. Mais les autorités doivent renforcer le dispositif policier et militaire pour les jours en question… d’après ce que nous avons compris."

Selon LD&C, la date du début de la remise des fonds n’est pas encore arrêtée, mais elle pourrait commencer dès la semaine prochaine. L’avocat de Claude Gohourou, parle quant à lui du mois de mars… Le feuilleton n’est peut-être pas encore tout à fait terminé.

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