Fissures, de Hicham Ayouch : Jules et Jim version trash

Précédé d’une odeur de soufre, Fissures, de Hicham Ayouch, a été un véritable choc pour les spectateurs du Festival international du film de Marrakech.

Publié le 9 décembre 2009 Lecture : 2 minutes.

C’est l’un des coups de cœur du festival et le public attendait, fébrile, la projection de Fissures. On avait promis un film choc, vous allez être servi.

Un matin, Abdeslem sort de la prison de Tanger. Son ami Nourredine vient le chercher et ils passent la nuit ensemble à fêter la liberté recouvrée. Mais leur amitié est menacée quand débarque dans leur vie l’étrange Marcela, une brésilienne fantasque et excessive.

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Hicham Ayouch, déjà auteur des Arêtes du cœur, filme ici l’errance de trois marginaux qui s’abîment dans l’alcool, la drogue et la passion. Hurlements, bagarres, scènes de sexe extrêmement crues, Ayouch n’épargne rien au spectateur. D’ailleurs, dans la salle, nombreux se sont levés au cours de la projection, sans doute mal à l’aise.

Ayouch filme avec beaucoup de poésie l’interaction entre la folie de ses personnages, leur perte de repères et les rues sombres de Tanger. Au coin de chaque ruelle de la ville blanche, d’autres marginaux surgissent, sniffeurs de colle, fumeurs de haschich, sans papiers, comme si la ville ne cessait d’enfanter la folie et la déshérence.

Fissures est aussi une histoire d’amour. En s’installant dans la vie des deux hommes, Marcela fait entrer la passion dans leurs existences et les entraîne dans sa propre descente aux enfers. La comédienne, Marcela Moura, est terriblement juste. Elle porte tout le film sur ses épaules et parvient à incarner la folie sans verser ni dans l’hystérie ni dans la caricature. Elle est d’autant plus étonnante qu’au naturel, elle donne l’impression d’une femme extrêmement douce et discrète.

Le film d’Ayouch est un véritable exercice de style, qui se situe plus du côté du cinéma expérimental que de la narration classique. Disposant d’un très petit budget et d’une équipe réduite, il a fait le choix de tourner sans scénario, en laissant à ses acteurs le soin d’improviser. Un pari risqué, mais tenu haut la main. Sans doute parce qu’Hicham a su s’entourer de comédiens atypiques, qui ont accepté de côtoyer la folie.

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Après la projection, les spectateurs en parlent avec passion. Certains ont adoré, d’autres ont trouvé ça insupportable mais Fissures n’a, en tout cas, laissé personne indifférent. Dans un café, deux jeunes femmes discutent. L’une d’elle soupire : « Tu vois, j’en suis encore toute retournée. Ça m’a fait quelque chose mais je ne sais pas… C’est comme un malaise qui continue à vivre en moi. »

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