Yar’Adua malade : grandes manoeuvres en coulisses

Les spéculations et calculs se multiplient dans la perspective d’un « après Yar’Adua ».

Publié le 8 décembre 2009 Lecture : 3 minutes.

L’état de santé du président nigérian Umaru Yar’adua, qui ne s’est toujours pas exprimé deux semaines après son hospitalisation d’urgence en Arabie saoudite pour une affection cardiaque sérieuse, fait l’objet d’un débat public de plus en plus vif au Nigeria.

Umaru Yar’Adua, 58 ans, notoirement en mauvaise santé depuis plusieurs années, s’est rendu en Arabie saoudite le 23 novembre pour raisons médicales. Son médecin personnel, le docteur Salisu Banye, a annoncé le 26 novembre qu’il est soigné à l’hôpital Roi Fayçal de Jeddah pour une péricardite aiguë, une inflammation de la membrane entourant le coeur.

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Face à la montée des appels à son départ dans les medias et certains cercles politiques, et même de la part du chef du barreau des avocats nigérians, le gouvernement n’a cessé d’allumer des contre-feux, alors que les dernières informations officielles sur la santé d’Umaru Yar’adua remontent. . . au 26 novembre.

Et les rumeurs vont bon train. Les quotidiens publient des extraits de la Constitution concernant ce qui est prévu en cas de décès, de démission ou de déclaration d’inaptitude du président, des articles médicaux, et interrogent des juristes sur les implications d’une vacance.

"Le président sera bientôt de retour"

Depuis le 26 novembre, une chape de plomb s’est abattue sur le sujet, donnant libre cours aux spéculations et calculs en prévision de l’"après Yar’Adua". Avec en ligne de mire l’élection présidentielle du printemps 2011.

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Le parti au pouvoir, le PDP, tient une convention jeudi, avec à l’ordre du jour la santé du président, et le principal parti d’opposition, Action Congress (AC) se réunit deux jours plus tard à Lagos.

Mercredi dernier, le conseil des ministres avait exclu tout départ de la présidence d’Umaru Yar’Adua. "Le Conseil, qui a passé en revue tous les éléments, a estimé à l’unanimité qu’il n’y avait pas de base pour invoquer l’article 144 de la Constitution, le président n’ayant pas été jugé inapte à assurer ses fonctions", indiquait alors le gouvernement.

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Troisième personnage de l’Etat, le président du Sénat, le général en retraite David Mark, a de son côté exclu de mettre sur pied une commission pour juger de la capacité du président à assumer ses fonctions.

D’autant qu’officiellement ce dernier "répond favorablement" aux traitements qui lui sont administrés.

Sa famille est elle-même montée au créneau ces derniers jours: "ceux qui réclament (sa) démission devraient craindre Dieu. Le président sera bientôt de retour, plus fort que jamais", a déclaré la soeur cadette de M. Yar’adua, Hajya Binta Kuraye, citée lundi par le quotidien Nigerian Tribune.

L’équilibre Nord-Sud menacé ?

Au-delà de l’état de santé du président, c’est le délicat équilibre entre le nord musulman et le sud chrétien qui risque d’être en jeu dans les mois à venir.

Musulman du Nord et gouverneur de l’Etat de Katsina, Umaru Yar’Adua, a succédé au chrétien Olusegun Obasanjo qui est resté au pouvoir de 1999 à 2007.

Obasanjo souhaitait, au prix d’un "toilettage" de la Constitution qui limite la présidence à deux quinquennats successifs, obtenir un troisième mandat, mais il en a été empêché par le Parlement et des pressions internationales. Il a donc rendu le pouvoir au Nord musulman, mais en imposant le gouverneur Yar’Adua, alors peu connu et à la mauvaise santé notoire.

Or, en cas de décès ou d’incapacité, c’est l’actuel vice-président Goodluck Jonathan, un chrétien du Sud, qui assurerait la fin du mandat présidentiel jusqu’en avril 2011, aux termes de la Constitution d’inspiration américaine.

Une certitude est qu’au Nord, on accepterait difficilement que le pouvoir repasse au Sud pour trop longtemps.

L’enjeu est de taille dans une encore fragile fédération de 150 millions d’habitants qui, en un demi-siècle d’histoire, a connu 8 coups d’Etats militaires, près de 30 ans de régimes militaires, et une brutale guerre civile de 3 ans, le tout sur fond d’incessantes rivalités ethniques et religieuses.

(avec AFP)

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