Affaire NDiaye – Raoult : devoir de résistance

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Publié le 14 novembre 2009 Lecture : 2 minutes.

Lauréate du Goncourt 2009 pour Trois femmes puissantes (Gallimard), l’écrivain français Marie NDiaye a expliqué, dans deux interviews antérieures au prix, être partie à Berlin (Allemagne) en partie par dégoût de la France de Nicolas Sarkozy. Des propos qui n’ont pas plu au député UMP Eric Raoult qui a estimé que les écrivains salués par l’Académie Goncourt étaient soumis à un « devoir de réserve »…

Eric Raoult est un député UMP français, élu en Seine-Saint-Denis. Quand il s’adresse par écrit au ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, c’est en tant que député qu’il s’exprime – et non en tant que simple citoyen. Quand il affirme que le lauréat du Prix Goncourt, (une « personnalité qui défend les couleurs littéraires de la France »…) est soumis à un « devoir de réserve », il donne son point de vue de citoyen, mais aussi et surtout son avis d’élu.

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Ainsi, pour un député UMP, l’écrivain Marie NDiaye n’aurait pas le droit de dire, à propos de la France de Nicolas Sarkozy : « Je trouve détestable cette atmosphère de flicage, de vulgarité… Besson, Hortefeux, tous ces gens-là, je les trouve monstrueux. » Au-delà de la polémique qui a gonflé dans les journaux français – le ministre de la culture jouant l’équilibriste sur un fil tendu entre le gouvernement auquel il appartient et la communauté des artistes qu’il est censé défendre – l’affaire est synonyme d’une dangereuse dérive.

Que souhaite, au fond, Eric Raoult ? Tout simplement que les gens qui ne pensent pas comme lui se taisent. Qu’il remplace « devoir de réserve » par « principe de modération » ne change rien au problème : il ne veut pas voir une tête dépasser. Atmosphère de flicage ? Attitude monstrueuse ? Marie NDiaye a raison de persister : « Il n’est plus nécessaire d’affiner mes propos antérieurs, que je maintiens. »… Quand des élus ont dans l’idée de limiter la liberté des artistes, quand ils envisagent de réduire au silence des voix discordantes, le pire est à craindre. Bertolt Brecht, dans La résistible ascension d’Arturo Ui (pièce écrite en 1941, publiée en 1959) prévenait déjà : « Le ventre est encore fécond, d’où a surgi la bête immonde ». A une pensée qui veut régner seule et sans partage, il convient de résister.

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