RDC : la double peine des prisonniers
Les évasions et mutineries se multiplient pour contester les mauvaises conditions de détention.
En République Démocratique du Congo, les prisons centrales sont régulièrement le théâtre de mutineries, évasions collectives et assassinats. Ces opérations sont une manière pour les prisonniers d’exprimer leur mécontentement face à la surpopulation carcérale, la malnutrition et la recrusdescence des maladies.
Plusieurs ONG présentes en RDC dénoncent cette situation. Selon la chef de mission d’Avocats Sans Frontières (ASF) en RDC, Aurore Decarnières, on ne peut parler d’actualité particulière sur la détention dans le pays. Les évasions ou tentatives d’évasion sont monnaie commune dans les prisons.
Chaque mois, dix à quinze cas d’évasion sont recensés sur 150 détenus à la prison centrale de Mbandaka. Au mois d’octobre, sept détenus sont morts à la prison de Bunia, dans le district d’Ituri.
Surpopulation carcérale
Le 5 novembre, 115 anciens militaires incarcérés à la prison d’Uvira, une province voisine, ont tenté de s’évader à cause des mauvaises conditions de détention. Mais les militaires FARDC ont réussi à maîtriser la situation et l’opération a fait 3 morts et 14 blessés.
La Monuc (Mission de l’Organisation des Nations Unies en RDC) a révélé lors d’une réunion en juin 2009 que les prisonniers manquaient de nourriture et de soins médicaux. Quarante-sept d’entre eux, dont trois enfants, sont dans une condition critique.
Cette situation résulte de la surpopulation carcérale : 500 prisonniers sont incarcérés, pour une structure conçue pour 200 personnes.
A l’origine de cette surpopulation, le recours excessif à la détention préventive. L’article 17 al 1 de la Constitution congolaise dispose que la liberté individuelle est la règle et la détention l’exception. Mais en réalité, 70 à 80 % des prisonniers sont des détenus préventifs.
ASF, ONG basée à Bruxelles, collabore en RDC avec des avocats qui assurent des permanences dans les prisons centrales de Kinshasa, Bukavu, Kindu et Mbandaka. Son dernier rapport date de début 2009 et dévoile des chiffres alarmants : 97 à 100% des placements en détention ont violé les règles de droit.
Avant projet de loi
On apprend aussi qu’un prévenu a été détenu trois mois sans voir de juge à Kindu pour avoir vendu un morceau de viande qui ne lui appartenait pas. Le rapport dénonce par ailleurs la corruption qui orchestre les libérations de détenus. Ainsi, à Kinshasa, Emile Ngoy et Roger Andende ont été mis en liberté provisoire le 23 octobre au bout de 11 jours d’incarcération. Cela leur a coûté à chacun 5000 dollars à titre de caution.
Administrateur et directeur technique de l’Office de Gestion du Fret Maritime (Ogefrm), ils étaient détenus depuis 12 octobre pour usurpation du pouvoir dans le cadre de la signature d’un contrat.
« Rien ne change et c’est justement pour cela que le silence doit être brisé », conclut Aurore Decarnières. Les choses bougent doucement. La MONUC a organisé le mois dernier une journée de discussions sur le système pénitentiaire. Le gouvernement a pour sa part lancé une réforme pénitentiaire qui toucherait le code pénal général et le code de procédure pénale, et un avant projet de loi devrait être présenté avant la fin 2009.
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