Le gouvernement de coalition avance à pas comptés

Au lendemain du « bilan des 100 jours » du gouvernement d’union nationale au Zimbabwe, le constat est sans appel : la crise est loin d’être résorbée et il reste beaucoup à faire. D’autant que les frictions entre le président Robert Mugabe et son Premier ministre Morgan Tsvangirai continuent de se faire sentir, posant la question de l’efficacité de ce tandem d’anciens rivaux.

Publié le 22 mai 2009 Lecture : 4 minutes.

Ces dernières semaines, l’épidémie de choléra a semblé marquer le pas. L’utilisation du dollar américain et l’abandon de la monnaie locale ont permis de remplir de nouveau les rayons des supermarchés, et les hôpitaux et les établissements scolaires ont rouvert leurs portes.

Mais au sortir de près d’un an de paralysie politique après la défaite de Robert Mugabe aux élections générales l’année dernière, le nouveau gouvernement dirigé par Morgan Tsvangirai n’a pas entrepris de réforme notoire dans un pays ravagé par une crise économique, politique et sanitaire. D’ailleurs, toute la difficulté de réformer réside dans le fait que les caisses de l’Etat sont vides, les zimbabwéens ne parvenant plus à payer leurs impôts.

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Seule issue envisageable : parvenir à un minimum d’entente politique pour convaincre les bailleurs de fonds internationaux d’aider le Zimbabwe. Ces derniers conditionnent en effet leur soutien au retour de la stabilité, qu’il s’agisse de la libération des prisonniers politiques ou de la fin des exactions contre les fermiers blancs.

A propos de ce dernier point, le gouvernement d’union a annoncé fin avril qu’il allait lancer une enquête sur les occupations de fermes, appartenant à des Blancs, survenues dernièrement.

Des tensions au sommet

Le leader du Mouvement pour un changement démocratique (MDC, le principal parti d’opposition) aujourd’hui Premier ministre a demandé jeudi à la Communauté de développement d’Afrique Australe (SADC) de trancher. Il accuse le chef de l’Etat d’avoir violé les règles de partage du pouvoir. L’accord signé en septembre dernier prévoit que Robert Mugabe et Morgan Tsvangirai doivent statuer conjointement sur les nominations à des postes-clés. Or, le président vient de placer deux de ses proches sans consulter le chef du gouvernement.

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Gidéon Gono a ainsi été reconduit en décembre, pour 5 ans, à son poste de gouverneur de la Banque centrale, alors que son précédent mandat avait été marqué par une inflation record se chiffrant en centaines de millions % en 2008.

En décembre également, Joannes Tomana été nommé procureur de la République et s’est depuis illustré en contribuant notamment à l’arrestation de défenseurs de Droits de l’Homme et des partisans du MDC.

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Selon Morgan Tsvangirai, en dépit des progrès réalisés et de l’amélioration des rapports entre lui et le président, les « violations continues de l’accord de partage du pouvoir menacent le gouvernement d’union ».

Les bailleurs de fonds internationaux à la rescousse

Des centaines de millions de dollars de crédit ont d’ores et déjà été débloqués par la communauté internationale. La Banque mondiale a annoncé lundi qu’elle donnerait 22 millions de dollars (16,3 millions d’euros) au Zimbabwe pour reconstruire son économie en déroute tandis que le Fonds monétaire international (FMI) a envoyé sur place des émissaires chargés d’établir un plan d’aide au pays.

Le Zimbabwe a également obtenu des crédits d’un montant de 450 millions de dollars de deux banques africaines (l’Afreximbank basée au Caire et la PTA Bank, dont le siège est à Nairobi) pour soutenir ses efforts.

La semaine dernière, 400 millions de dollars de lignes de crédit émanant de donateurs bilatéraux africains, notamment de pays membres de la SADC et du Marché commun pour l’Afrique orientale et australe (COMESA), ont aussi été octroyés au pays.

Mais Harare a estimé que le pays aurait besoin de 8,5 milliards de dollars (6,2 milliards d’euros) pour redynamiser son système économique. De l’avis des analystes, le sort du Zimbabwe dépend donc désormais de ses rapports avec l’extérieur.

Du rôle de l’Afrique du Sud

Dans une interview à la télévision sud-africaine, la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton a confirmé que les Etats-Unis refusaient de reprendre leur aide économique, de crainte qu’elle soit détournée. Elle a par ailleurs laissé entendre qu’il serait « dans l’intérêt de tous » que Robert Mugabe renonce à son poste.

Selon elle, si c’est au gouvernement zimbabwéen de trancher, les pays voisins, et en particulier l’Afrique du Sud, ont un rôle à jouer.

En effet, l’arrivée au pouvoir de Jacob Zuma pourrait constituer un tournant dans les relations entre les deux pays. Si l’ancien président sud-africain Thabo Mbeki, pour ne pas entacher ses bonnes relations avec Robert Mugabe, a toujours déclaré qu’il n’y avait « pas de crise au Zimbabwe », son successeur pourrait bien, lui, accentuer la pression sur son voisin.

Déjà lors des élections controversées en avril dernier, Jacob Zuma avait critiqué l’attitude de Robert Mugabe qui refusait de publier les résultats officiels. Contrairement à l’ancienne équipe, le gouvernement Zuma « ne s’abstiendra pas de critiquer ou d’exprimer son mécontentement » envers les dirigeants à Harare, estime Siphamondla Zondi, chercheur à l’Institut pour le dialogue global.

Mais de son côté, l’analyste zimbabwéen Takavafira Zhou de l’Université de Masvingo tempère : « Zuma a suffisamment de problèmes sur les bras dans son pays pour ne pas s’impliquer fortement en politique étrangère ».

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