Le CRAN perd la tête

Le Conseil représentatif des associations noires de France (CRAN) lave son linge sale en justice. Des dissidents de la fédération ont saisi un tribunal pour obtenir un audit sur la gestion des fonds, ainsi que l’annulation de la réélection du président Patrick Lozès. Le principal intéressé, lui, répond qu’il n’a rien à dire.

Publié le 6 mai 2009 Lecture : 2 minutes.

Après la méthode douce, la méthode forte. Plusieurs membres du Conseil représentatif des associations noires (CRAN) de France ont demandé en interne un audit sur la gestion des fonds de l’association qui s’est imposée comme le porte-voix des revendications de la communauté noire. Faute de réponse, six d’entre eux, regroupés au sein d’une fraction qui s’est baptisée « le Directoire », ont décidé d’attaquer en justice le président Patrick Lozès.

Figure emblématique du CRAN, depuis sa fondation, le 26 novembre 2005, l’homme est omniprésent dans les médias. Il dénonce sans relâche les discriminations et milite pour la mise en place de « statistiques de la diversité ».

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Le fonds du gouffre

« Notre action vise à obtenir la désignation d’un mandataire de justice qui convoquera une nouvelle Assemblée générale et lancera un audit concernant les fonds et leur gestion par le CRAN, explique Me Emmanuel Daoud, l’avocat du Directoire. Il s’occupera aussi des affaires du CRAN en attendant que la justice statue sur la validité de l’élection de M. Lozès. » L’homme de loi précise qu’en septembre une autre procédure commencera dans l’espoir de faire annuler la réélection de Patrick Lozès.

D’autres membres du CRAN ont également saisi la justice pour faire la lumière sur la gestion des ressources du mouvement. « Nous avons déposé une plainte contre X et versé toutes les preuves pour obtenir une vérification de la comptabilité relative à la gestion de l’association», indique Christine Louis-Quere, membre d’un groupe de quatre plaignants.

Interrogé sur le procès intenté par le Directoire, dont le jugement pourrait intervenir ce jeudi 7 mai, Patrick Lozès lance, agacé : « Je n’ai aucun commentaire à faire. Voilà ma déclaration (…). Si jamais vous colportez des rumeurs sur moi ou sur le CRAN, j’exercerais mes droits. Je n’hésiterais pas à garantir mon honneur personnel ».

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Le CRAN, un « strapontin ministériel » ?

Les dissensions au sein du CRAN ne datent pas d’hier, et les comptes se règlent par procès interposés. Outre la gestion des fonds et le mode de fonctionnement, certains opposants remettent en question la sincérité de Patrick Lozès. « Il se sert du CRAN comme d’un strapontin pour avoir un poste ministériel, mais il ne l’avouera jamais », s’emporte Komlan Rigobert Missinhoun, porte-parole du Comité pour la refondation du Cran (CRC), un groupe fondé en décembre 2006.

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Lucien Pambou, co-fondateur du CRAN, dénonce quant à lui une « instrumentalisation ». « Le CRAN est une institution républicaine destinée à damer le pion à [l’humoriste] Dieudonné [notamment condamné pour antisémitisme] et à calmer les ardeurs [du mouvement extrémiste interdit] Tribu Ka, entre autres », analyse « sans rancœur » le secrétaire général « mis à l’écart », qui prépare pour septembre 2009 un livre sur « le CRAN et le mouvement noir en France ».

Reste que l’image de la fédération sortira certainement ternie par les querelles internes. « Je me préoccupe moins de l’image du CRAN que de la promesse de parler au nom des Noirs de France », confie Emmanuel Ntonga, porte-parole du Directoire. Un proche de l’association conclut, amère, que « les Noirs de France ne sont pas crédibles : la preuve, ils se divisent. Tout ça ne sert personne. Ni le CRAN, ni le Directoire, ni les Noirs ».

*Le Directoire se compose de Nathalie Daouda, Françoise Jupiter, Mariam Babale Mevaa, Maguy Gestel, José Jean Pierre et Charles Lebelge.

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