Ministres et responsables de l’UMP tirent à boulets rouges sur Royal

Le parti au pouvoir en France a fustigé le discours de Ségolène Royal, prononcé lundi à Dakar. La socialiste avait notamment demandé « pardon » pour les déclarations « humiliantes » sur l’Afrique que le président Nicolas Sarkozy avaient faites en 2007 dans la capitale sénégalaise. Une position que le PS soutient.

Publié le 7 avril 2009 Lecture : 4 minutes.

L’Union pour un mouvement populaire (UMP) fulmine. La droite française a multiplié les sorties depuis le discours que Ségolène Royal a prononcé lundi après-midi à Dakar. Dans l’enceinte de la maison du Parti socialiste (PS) sénégalais, la candidate malheureuse à la présidentielle française de 2007 a pris le contre-pied du « Discours de Dakar » du chef de l’Etat Nicolas Sarkozy.

Le 26 juillet 2007, l’ancien ministre de l’Intérieur avait entre autres déclaré : « Le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire. Le paysan africain, qui depuis des millénaires, vit avec les saisons, dont l’idéal de vie est d’être en harmonie avec la nature, ne connaît que l’éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes et des mêmes paroles ».

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« Pardon pour ces paroles humiliantes »

Les propos avaient provoqué un tollé. Ségolène Royal a tenté de cicatriser la blessure en prononçant un discours de glorification de l’Afrique.

« Quelqu’un est venu ici vous dire que "l’Homme africain n’est pas encore entré dans l’Histoire" », a-t-elle lancé devant plus de 500 personnes. « Pardon, pardon pour ces paroles humiliantes et qui n’auraient jamais dû être prononcées et -je vous le dis en confidence- qui n’engagent ni la France, ni les Français ».

« Pour le meilleur et parfois, hélas, pour le pire, nos histoires ont été liées. Le pire, ce fut l’esclavage (…), le pire aussi ce fut la colonisation dont une partie de la droite a essayé de nous faire croire (…) qu’elle avait des "aspects positifs" », a ajouté la présidente socialiste de la région Poitou-Charentes, se référant à un projet de loi qui avait été fortement décrié.

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Le discours de Sarkozy « ni raciste, ni péjoratif »

Levée de boucliers à droite. Le ministre des Affaires étrangères a qualifié d’« extraordinairement maladroite et très démagogique » la réaction de Ségolène Royal. Revenant sur la citation « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire », Bernard Kouchner, qui s’exprimait sur les ondes de RTL, souligne que « la phrase ne peut pas être retirée du contexte. Cette phrase était sans doute maladroite, mais cela ne signifiait ni racisme, ni jugement péjoratif ».

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Il précise que la phrase « a été mal comprise » et rappelle qu’« il y a eu après un discours du Cap (Afrique du Sud). Il a été très bien compris et il a annoncé ce qu’était la politique étrangère de la France vis-à-vis de l’Afrique, c’est-à-dire de pays adultes, indépendants ». Et de conclure : il est « terminé le temps des interventions avec l’armée française pour défendre les gouvernements en proie à des conflits internes. Une par une, les bases militaires sont négociées, et les accords de défense renégociés un par un ».

Rama Yade, secrétaire d’Etat chargée des Affaires étrangères et des Droits de l’Homme, abonde dans le sens de son ministre de tutelle. « Ces malentendus-là sont aujourd’hui instrumentalisés par Ségolène Royal dans un jeu politicien qui n’est pas très honorable », a-t-elle dit sur France 2. Rama Yade a également remis en cause « la sincérité de Mme Royal ».

« Antisarkozysme primaire »

Son homologue chargé de la Coopération a pour sa part jugé que « les déclarations de Mme Royal tenues à l’étranger sont choquantes, irresponsables et antidémocratiques. Elles sont tournées vers le passé ». Nadine Morano, secrétaire d’Etat à la famille, parle pour sa part de « démagogie systématique », d’« antisarkozysme primaire » ou encore d’« antisarkozysme hystérique ».

Quant à Frédéric Lefebvre, porte-parole de l’UMP, il reproche à Ségolène Royal d’avoir « fait un contresens historique en Afrique, tout simplement pour faire diversion. Le débat, c’est de savoir si la colonisation a gêné l’Afrique dans la construction de sa propre histoire, et c’est en tout cas la fierté des gaullistes d’y avoir mis fin ».

Selon lui, elle « n’a trouvé comme seul moyen de faire parler de son voyage -et de faire oublier que, contrairement à ce qu’elle avait prétendu, elle n’était pas reçue par le président Wade- que de proférer des attaques infantiles contre Nicolas Sarkozy devant ses amis du Parti socialiste Sénégalais ».

Le député des Hauts-de-Seine poursuit que, « de Chine à Dakar, en passant par Washington, Mme Royal ridiculise notre pays, par son attitude et ses sorties iconoclastes ».

« Paroles de pacification »

A gauche, le porte-parole du PS français estime que le discours de Ségolène Royal était légitime, puisqu’elle est « citoyenne française » et « dirigeante politique ». « Elle a raison de le faire et je ne vois pas pourquoi on va lui chercher querelle là-dessus », a-t-il indiqué sur i-Télé, en expliquant que les propos de Nicolas Sarkozy avaient été « injurieux pour l’histoire des Sénégalais et des populations d’Afrique noire ».

Le député européen Vincent Peillon va dans le même sens et confie que « cela a été une honte pour la France comme les discours sur le colonialisme (…), c’était une injure ». Le député du Doubs Pierre Moscovici a de son côté relevé sur Canal+ que, « quand Nicolas Sarkozy a dit que l’Afrique n’était pas suffisamment entrée dans l’histoire, il a prononcé un discours qui était ethniciste et insupportable et Ségolène Royal a raison de le dire ».

Ce proche de Ségolène Royal a ajouté sur RMC-Info et BFM-TV : « Est-ce que notre ancienne candidate à la présidentielle, qui a représenté 47% des Français, qui connaît bien le continent africain, avait le droit d’aller apporter des paroles de pacification et une autre vision de nos rapports et de l’histoire ? Moi je le crois profondément, c’est sa responsabilité ».

« Dès qu’elle s’exprime, a-t-il renchéri, elle est entendue. Finalement qu’il y ait encore des gens de gauche qui puissent être entendus, je m’en félicite ».

Reste que Ségolène Royal semble avoir atteint son objectif. Du moins au Sénégal. Le premier secrétaire du parti du PS sénégalais, Ousmane Tanor Dieng, considère qu’elle a « réhabilité la France aux yeux des Sénégalais ». (avec agences)

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