Les chers amis de Laurent Nkunda
Le Congolais Katebe Katoto et le Rwandais Tribert Rujugiro sont mis en cause par le rapport d’experts sur la guerre dans l’Est publié le 12 décembre par l’ONU.
Tribert Rujugiro et Katebe Katoto ont beaucoup de points communs : ils sont tous les deux hommes d’affaires, réputés « richissimes », sexagénaires et… cités dans un rapport sur la guerre en RD Congo publié le 12 décembre par l’ONU. Leur nom apparaît à la rubrique « Particuliers finançant le CNDP », le Conseil national pour la défense du peuple, le mouvement du rebelle Laurent Nkunda, qui, depuis le 28 août dernier, affronte les Forces armées de la RD Congo.
Rwandais, Tribert Rujugiro, 67 ans, père de six enfants, a fait fortune dans l’industrie du tabac, les brasseries, le secteur bancaire. Fondateur, en 2006, du Rwanda Investment Group, il dispose d’intérêts au Botswana, en Afrique du Sud, en Côte d’Ivoire, au Togo, au Kenya, en Ouganda… D’après les experts des Nations unies, cet ancien bailleur de fonds du Front patriotique rwandais (FPR), le parti au pouvoir au Rwanda, possède aussi plusieurs fermes dans le Masisi, territoire contrôlé par le CNDP. Dans l’une d’elles, à Kirolirwe, il aurait régulièrement reçu des dignitaires du mouvement, dont Laurent Nkunda, en 2006. Le 28 août 2007, il aurait envoyé un mail à l’un de ses employés à Dubaï, lui demandant de mettre 120 000 dollars à la disposition des « gens de notre ami Laurent N ». Le 6 juin 2008, poursuit le document, il aurait reçu un mail du colonel Gahizi, « l’un des commandants les plus influents du CNDP », l’informant que « les gens sont prêts » et lui rappelant d’envoyer « l’engin » comme il l’avait promis. Sollicité par Jeune Afrique, Tribert Rujugiro n’a pas réagi à ces mises en cause. Il est actuellement à Londres, en liberté provisoire depuis octobre dernier, après la délivrance d’un mandat par l’Afrique du Sud pour fraude fiscale.
Nettement plus disert, Katebe Katoto, lui, dénonce les « affabulations » dont il fait l’objet et assure n’avoir jamais été contacté par les auteurs du rapport. Natif du Katanga, cet ancien professeur de mathématiques âgé de 64 ans et père de cinq enfants est devenu un magnat de la pêche dans la région des Grands Lacs. Établi à Bruges, en Belgique – il a la nationalité belge –, il explique ainsi le virement de 25 000 dollars mentionné par le rapport, effectué le 7 février 2006 entre le compte de son épouse et celui d’Élisabeth Uwasse, l’épouse de Laurent Nkunda : « Je cherchais une maison à Goma, c’est très joli. Nkunda m’a dit, “c’est madame qui a les contacts pour la maison”. Je lui ai donc envoyé un acompte. » Avant de rappeler qu’à la date du virement le CNDP n’existait pas encore.
Laurent Nkunda, Katebe Katoto l’a connu pour avoir été, en 2003, vice-président du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD), qui, à l’époque, comptait le général dissident dans ses rangs. Mais d’après l’intéressé, leur dernier contact, « au téléphone », remonte à 2006. Aujourd’hui retraité, Katebe Katoto préside l’Union des libéraux pour la démocratie (ULD), un parti d’opposition sans députés ni sénateurs. Frère aîné de Moïse Katumbi, gouverneur du Katanga, l’ancien fournisseur en poissons de la Gécamines assure ne pas « mélanger la politique et la famille ».
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