Promenade à Bata

Calme et bouillonnante, simple et sophistiquée, étendue ou ramassée selon les quartiers, la capitale économique n’a rien de commun avec sa sœur insulaire, Malabo.

Publié le 17 décembre 2008 Lecture : 4 minutes.

Rêves de grandeur
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Rêves de grandeur

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Fondée en 1900, la capitale économique de la Guinée équatoriale est un paradoxe. De ses édifices étonnants d’originalité jusqu’à la disposition des chantiers, tout y est différent. Ses 300 000 habitants eux-mêmes ont une mentalité bien à eux, ce qui fait dire aux observateurs qu’il n’y a pas une mais plusieurs Guinée équatoriale.

Plongée dès l’aube sous un épais brouillard, la ville continentale, située sur la partie la plus francophone du pays, là où les Fangs sont majoritaires, s’étend comme un linge humide. Avec le lever du soleil, l’atmosphère devient moite, presque pesante, malgré la brise vivifiante venue du large.

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Une fois retombée l’angoisse provoquée par l’improbable navette aérienne qui effectue quotidiennement la rotation avec Malabo, sitôt la sortie de l’aéroport à l’architecture de verre, l’attention du visiteur se porte sur le gigantesque Paseo maritime que longe la route menant jusqu’au centre historique. Érigé dans la pure tradition espagnole, cet ouvrage court sur plusieurs kilomètres. Large d’une dizaine de mètres agrémentés de pelouses, de fontaines, de très chic lampadaires, de bancs et de palmiers soigneusement alignés, le Paseo maritime n’a pas d’équivalent en Afrique. Interrogez les Équato-Guinéens qui le fréquentent, des jeunes pour la plupart, la réponse est unanime. Ses allures de Croisette en font un véritable lieu de détente que tous s’approprient, faisant revivre le bord de mer. D’autant que l’aménagement récent des berges et la construction de plages attirent de plus en plus de monde. Ne manquent que les starlettes et l’hôtel Carlton pour que la scène devienne cannoise. Face à cette délicieuse promenade de bord de mer, dont 4 kilomètres supplémentaires sont en cours d’aménagement, nombre d’hôtels, qui n’existaient pas il y a dix ans, ont une vue imprenable sur la baie et ­comblent progressivement la faible capacité d’hébergement.

Ville plate, chef-lieu de la province du Littoral, verdoyante et bordée de dizaines de villas aux jardins soigneusement entretenus, celle qui n’était au début du XXe siècle qu’un petit poste militaire espagnol (qui comptait moins de 150 habitants) dévoile aussi quelques chefs-d’œuvre. Ses églises, ses monuments, ses presbytères et, surtout, sa cathédrale du XVIIe siècle surmontée de deux dômes, lesquels renvoient, étrangement, non à la tradition catholique – fortement implantée dans le pays (90 % de la population) –, mais à la tradition orthodoxe. Historique, le marché central redonne à la ville son côté africain. Toutes les communautés s’y côtoient et font de ce lieu le plus cosmopolite du pays. Non loin, la place du Coup-de-la-Liberté (ancienne place de l’Horloge) accueille toujours de vieilles maisons coloniales, en cours de réhabilitation.

Pas besoin de marcher beaucoup dans la ville pour se rendre compte que, comme Malabo, Bata est aussi gagnée par la frénésie de la construction. Tous les quartiers sont concernés. Des plus prestigieux, comme les quartiers résidentiels de Dimbala, Îles des Cocos ou Etofili-Iyubi, actuellement en pleine expansion, aux quartiers plus populaires de Nfefesala ou de Ncolombong. Bata va-t-elle à terme supplanter Malabo ? La question n’est pas à l’ordre du jour, ce qui n’empêche pas les édifices et autres bâtiments publics de sortir de terre à la vitesse de l’éclair. Ministères, équipements sociaux, hôpitaux, écoles, immeubles de logements, maisons de style andalou, commerces, ponts, routes et avenues, réseau d’adduction d’eau… De toutes les villes de l’ancienne colonie espagnole, Bata est, de l’avis général, celle dont le profil a le plus changé, malgré l’existence tenace de quelques bidonvilles traversés par les routes allant vers Niefang (à l’ouest) ou Mbini (au sud).

Une urbanisation qui laisse la ville respirer

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Bien que Malabo soit la capitale politique, six mois par an, l’ensemble du gouvernement se « téléporte » à Bata, qui a abrité plusieurs événements d’envergure ces dernières années. Elle abrite le nouveau siège du Parlement, qui a accueilli en 2006 le sommet des chefs d’État de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). Elle a également organisé, en novembre 2007, la Conférence économique qui a adopté la stratégie du pays à l’horizon 2020.

À une dizaine de kilomètres du centre, près de la zone industrielle, le port est lui aussi en pleine mutation, sous la houlette d’une société chinoise, et une nouvelle zone, baptisée Bata II, sort de terre. Sur le modèle de Malabo II, elle accueillera des sièges d’administrations, des commerces et des centres sportifs.

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D’ici à quelques années, la ville, qui tire l’essentiel de sa richesse de l’exploitation forestière, possédera également son « Mosoleo », une vaste place arborée étendue sur des dizaines d’hectares, derrière le grand hôtel Plazza, dédié aux « grandes personnalités du pays ». En revanche, comme sur l’île de Bioko, les restaurants et les bars ne sont pas légion. Et même si le Drink Cool reste la boîte la plus en vogue de la région, l’exubérance n’est pas encore équato-guinéenne.

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