Des finances peu « orthodoxes »

Publié le 16 décembre 2008 Lecture : 2 minutes.

Si les adversaires du président ivoirien Laurent Gbagbo se trouvaient à court d’arguments pour la campagne présidentielle, ils auraient tout loisir d’en trouver dans la dernière Revue de la gestion et du système de finances (novembre 2008), dont Jeune Afrique s’est procuré une copie. Rédigé par la Banque mondiale avec l’aide du gouvernement, ce document met en lumière de nombreux dysfonctionnements : faiblesse de la gouvernance, manque de transparence, inflation des dépenses de défense et de sécurité, opacité de gestion des matières premières, etc.

« Globalement, le système des finances publiques se situe en dessous de la moyenne des pays africains, malgré un cadre réglementaire relativement complet », indique en préambule la Banque. Le budget de l’État est jugé peu fiable et « à courte vue » en raison de nombreux décalages entre les prévisions et les dépenses réelles, ainsi que d’un manque de projection.

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Combien de barils ?

En dépit de l’abondance des ressources naturelles de la Côte d’Ivoire, le recouvrement des taxes y est très inférieur à ce qu’il est dans d’autres pays pauvres. Le ratio recette/PIB n’y est que de 17 %, contre 26 % au Malawi et 24 % au Ghana et au Sénégal. Une partie des revenus des hydrocarbures n’apparaît pas dans le budget de la nation. D’ailleurs, on ne connaît même pas avec précision le volume de la production : moins de 50 000 barils/jour, comme l’affirment les autorités ? Ou plus de 80 000 b/j, comme le prévoit la Banque mondiale ?

« Nous recommandons avec insistance aux pouvoirs publics de prendre des mesures afin d’exercer un meilleur contrôle sur les volumes exportés et sur les composantes du cost-oil [part de la production allouée au recouvrement des coûts du contractant dans un contrat de partage de production, NDLR] », explique, en des termes très diplomatiques, un autre document récent émanant celui-là de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (Bird). Quant au café/cacao, une grande partie des prélèvements – plus de 400 milliards de F CFA (610 millions d’euros) depuis 2001 – n’est pas justifiée.

L’éducation sacrifiée

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Côté dépenses, le budget alloué à la présidence est régulièrement dépassé et le contrôle des marchés publics n’est pas assuré en dessous de 100 millions de F CFA. La priorité des autorités va au paiement des fonctionnaires et des militaires, afin d’éviter tout trouble social et toute tentative de coup d’État. « La masse salariale représente 43 % des recettes fiscales, chiffre très supérieur au critère de convergence de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (35 %) », précise le rapport. En revanche, les dépenses d’éducation, qui représentaient 28 % du total du budget en 2000, n’en représentent plus que 21 % en 2008. Même constat pour l’agriculture (4,6 % en 1999, 1,5 % en 2007) et la santé (de 9 % à 6,7 %). Enfin, les infrastructures se détériorent d’année en année. Sur 82 000 km de routes, 30 000 km sont très dégradés.

Des efforts ont néanmoins été faits depuis deux ans. Il leur manque d’être « portés par une forte volonté politique ». Les institutions financières, qui ont recommencé à discuter des modalités d’annulation de la dette, dont le montant vertigineux (15 milliards de dollars) asphyxie littéralement le pays, rappellent régulièrement au gouvernement ivoirien qu’il ne doit pas compter sur un « coup d’éponge magique » tant que la gestion ne s’améliorera pas.

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