Gilles de Kerchove

Coordinateur de l’Union européenne chargé de la lutte antiterroriste

Publié le 11 décembre 2008 Lecture : 2 minutes.

Jeune Afrique : Où en est la menace terroriste en Europe ?

Gilles de Kerchove : Elle est inquiétante, dans certains pays. Elle provient d’abord d’une zone à cheval sur la frontière pakistano-afghane, où les camps d’entraînement attirent de plus en plus d’aspirants djihadistes. Ensuite, d’Al-Qaïda au Maghreb islamique. Enfin, il existe en Europe une radicalisation qui incite des individus sensibles à la rhétorique d’Al-Qaïda à monter des opérations.

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Le Sahel est-il toujours aussi exposé ?

La menace y est forte. Pour Al-Qaïda, la Mauritanie est une cible privilégiée, tandis que le Mali et le Niger servent de bases de repli. Et puis, il y a les multiples trafics entre la Guinée-Bissau (notamment) et le Nord, qui servent les intérêts des groupes islamistes.â©L’UE envoie dans la région des missions dirigées par le juge antiterroriste Jean-François Ricard. Elles seront complétées par des missions en Algérie et au Maroc.

Existe-t-il des connexions entre Al-Qaïda et la rébellion touarègue ?

Il peut y avoir des solidarités de circonstance, mais la menace concerne surtout l’Algérie et le Maroc. Il faut une approche spécifique à cette région du monde, pour l’empêcher de se transformer en école du terrorisme.

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Que fait l’UE dans ces pays ?

Nos programmes avec la Mauritanie sont suspendus tant que ce pays ne reviendra pas à l’ordre démocratique. Au Mali et au Niger, nous renforçons les appareils policiers et judiciaires locaux, ainsi que le contrôle aux frontières. Trois millions d’euros ont enfin été investis dans un centre de formation de policiers à Alger. Un autre centre sera construit au Sahel.

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Y a-t-il des groupuscules plus au sud ?

Oui. L’UE va envoyer une mission en Guinée-Bissau, par où transite 10 % de la production mondiale de cocaïne. La fragilité de certains pays favorise l’implantation de groupes terroristes. Un plan de lutte contre le trafic de drogue dans cette zone va être mis en place.

La situation est-elle comparable à celle qui prévalait à l’époque des GIA ?

Des cellules dormantes des GIA en France s’étaient transformées en cellules opérationnelles. Le scénario est le même avec Al-Qaïda, dont certaines cellules sont les supports logistiques d’actions ultérieures. Pour l’instant, rien n’indique que ces actions auront lieu.

Quels programmes antiterroristes l’Union met-elle en œuvre ?

Nous travaillons sur trois axes : la répression à travers le renseignement ; la protection des infrastructures et des frontières ; le renforcement des dispositifs nationaux afin de pouvoir réagir à un attentat majeur.

La question du terrorisme est-elle idéologique ou religieuse ?

D’abord, idéologique. Le choc des civilisations oppose l’islam des Lumières à l’islam fanatique. Les gens que nous arrêtons sont d’une ignorance crasse en matière religieuse.

Comment éviter que les prisons servent au recrutement de djihadistes ?

Le phénomène s’aggrave et pose de délicats problèmes. Faut-il disséminer les activistes dans différentes prisons ou les concentrer en un seul lieu ? Peut-on les priver de supports religieux comme la lecture ou la fréquentation d’un imam ? Six pays vont prochainement mettre en commun leur expérience en la matière.

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