Les visiteurs

Chefs d’État, Premiers ministres et autres responsables politiques, mais aussi diplomates, entrepreneurs, avocats, chercheurs, artistes, journalistes… Des centaines de personnalités ont laissé une trace écrite de leur passage dans nos locaux.

Publié le 10 décembre 2008 Lecture : 6 minutes.

« C’est en allant vers la mer que le fleuve reste fidèle à sa source. » Couché par un visiteur sur l’élégant cahier au papier crème et à la reliure rouge encadrée d’un liseré doré, cette citation du socialiste français Jean Jaurès rend hommage au long combat de Jeune Afrique.

Depuis vingt ans, J.A. tient en effet un livre d’or. Une tradition à laquelle Béchir Ben Yahmed est très attaché. Des centaines de personnalités y ont laissé la marque de leur passage, d’abord avenue des Ternes, dans le 17e arrondissement de Paris, où notre journal était établi de 1965 à 1989, puis, à partir de cette date, au siège actuel, rue d’Auteuil, dans le 16e arrondissement.

la suite après cette publicité

Dans la tradition européenne, le livre d’or était un registre sur lequel étaient inscrits, en lettres d’or justement, les noms de familles nobles. Si, au fil du temps, ce type de document s’est démocratisé, il a toujours vocation à accueillir les signatures de célébrités et à recevoir des commentaires flatteurs. C’est tout sauf un cahier de réclamations…

Pour ce qui concerne le livre d’or de Jeune Afrique, il est inauguré par une figure d’exception, Moktar Ould Daddah. Quand il laisse son message, le 3 juillet 1989, cela fait onze ans que le premier président de la République de Mauritanie a été renversé par un coup d’État.

Lui succéderont nombre d’autres chefs d’État, en activité ceux-là : le Cap-Verdien António Mascarenhas Monteiro, le Congolais Pascal Lissouba, le Tchadien Idriss Déby Itno, le Burundais Pierre Buyoya à deux reprises, l’Équato-Guinéen Obiang Nguema Mbasogo, le Comorien Assoumani Azali, un autre Cap-Verdien, Pedro Pires, le Centrafricain François Bozizé, le Mauritanien Ely Ould Mohamed Vall.

Lorsqu’il arrive rue d’Auteuil, en mai 1999, Abdoulaye Wade est encore le leader de l’opposition sénégalaise ; il sera élu président en avril 2000. Pour sa part, Boni Yayi, chef de l’État béninois depuis mars 2006, est président de la BOAD (Banque ouest-africaine de développement) lors de son passage en février 2001.

la suite après cette publicité

Amadou Toumani Touré vient en tant que président du Mali en novembre 1991. Deux ans plus tard, en octobre 1993, il signe « ancien chef de l’État » et, lors d’une nouvelle visite, en juin 1996, il ajoute « général de brigade ».

Entre-temps, son compatriote Alpha Oumar Konaré, qui est de passage à J.A. en septembre 1994, a accédé à la présidence du Mali. En novembre 2002, lorsqu’il est de retour chez nous, il vient d’achever son second et dernier mandat et sera porté à la tête de la Commission de l’Union africaine en mars 2003.

la suite après cette publicité

Plus impressionnant encore est le défilé des Premiers ministres : Casimir Oyé Mba (Gabon), Hamid Algabid (Niger), Kasdi Merbah (Algérie), Sidi Mohamed Ould Boubacar (Mauritanie), Bello Bouba Maïgari (Cameroun), Hama Amadou (Niger), Adrien Houngbédji (Bénin), Kwassi Klutse (Togo), Pascal Affi Nguessan (Côte d’Ivoire), Ernest Paramanga Yonli (Burkina), ­Kassiré Koumakoye (Tchad), Faustin Archange Touadéra (Centrafrique).

Charles Konan Banny est gouverneur de la BCEAO quand il se rend à J.A. en septembre 1993. Treize ans plus tard, en avril 2006, il vient nous voir en tant que Premier ministre de la Côte d’Ivoire. Six mois après, Guillaume Soro passe lui aussi : le futur successeur de Konan Banny n’est encore que secrétaire général des Forces nouvelles.

De nombreux autres responsables politiques – souvent ministres voire chefs de gouvernement à un moment ou à un autre – connus sur la scène internationale complètent cet aréopage. Parmi eux, Chedli Ayari et Dali Jazi (Tunisie) ; Moustapha Ka, Mamadou Diop, Cheikh Hamidou Kane, Cheikh Tidiane Gadio, Idrissa Seck (Sénégal) ; Bachir Boumaza (Algérie) ; Tiébilé Dramé, Soumaïla Cissé (Mali) ; Mohammed-Lamine Fadika, Laurent Dona-Fologo, Paul-Antoine Bohoun Bouabré (Côte d’Ivoire) ; M’Hamed Boucetta (Maroc) ; Albert Tévoédjrè, Robert Dossou, Bruno Amoussou (Bénin) ; Ablassé Ouedraogo (Burkina) ; Hamdi Ould Mouknass (Mauritanie) ; Anicet-Georges Dologuélé (Centrafrique) ; Léonard She Okitundu (RD Congo) ; Kassory Fofana (Guinée) ; Ali Triki (Libye) ; Mahamadou Issoufou (Niger).

Les opposants « historiques » ne sont pas en reste : nous avons reçu, entre autres, les Algériens Hocine Aït Ahmed et Saïd Sadi, et le Guinéen Alpha Condé.

La lecture de notre livre d’or permet de restituer des pans entiers d’histoire africaine. Quand il passe nous voir, le 26 février 1999, le général Ibrahim Maïnassara Barré, président du Niger depuis juillet 1996, n’a plus que quelques semaines à vivre. Le 9 avril, il sera abattu à l’aéroport de Niamey.

La succession des Premiers ministres guinéens est le reflet de l’instabilité qui caractérise la fonction dans ce pays depuis une dizaine d’années. Sidya Touré passe en octobre 1996, François Lonsény Fall en avril 2004, Cellou Dalein Diallo en novembre 2006, Lansana Kouyaté en avril 2007. Ahmed Tidiane Souaré était chez nous en octobre dernier.

De la rue Monsieur à la rue d’Auteuil, il n’y a que la Seine à traverser pour les ministres (ou anciens ministres) français de la Coopération Michel Aurillac, Michel Roussin, Bernard Debré, ­Jacques Godfrain. Plusieurs de leurs successeurs viendront également nous voir, en particulier Jean-Marie Bockel, qui a occupé la fonction de juin 2007 à mars 2008, mais, allez savoir pourquoi, nous avons oublié de leur ­présenter le fameux livre.

Parmi les autres personnalités politiques françaises invitées à J.A., on note les noms de l’ancien Premier ministre Michel Rocard et de l’ex-ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine. Sans oublier des figures du monde du Renseignement : l’amiral Pierre Lacoste et Pierre Marion.

Jeune Afrique, Dieu merci, ne reçoit pas que des dirigeants politiques, mais aussi des diplomates, des chefs d’entreprise, des avocats, des chercheurs, des médecins, des artistes, des journalistes, etc.

Impossible de citer les dizaines d’ambassadeurs, africains mais pas seulement, passés par nos locaux. Pour ce qui est des organisations internationales, on relève les noms de deux secrétaires généraux de l’ancienne OUA : ceux du Camerounais William Eteki Mboumoua et du Tanzanien Salim Ahmed Salim. Hiroshi Nakajima, directeur général de l’OMS (Organisation mondiale de la santé), est venu en mars 1995. À la visite d’Omar Kabbaj, président de la BAD (Banque africaine de développement), en avril 1997, répond celle de son successeur, Donald Kaberuka, en mars 2005.

Deux secrétaires généraux de l’OCI (Organisation de la conférence islamique), l’un et l’autre anciens Premiers ministres, ont poussé la porte de J.A. à quelques mois d’intervalle : le Nigérien Hamid Algabid en août 1996, le Marocain Azzedine Laraki en janvier 1997.

Lotfi Belhassine, fondateur d’Air Liberté, a signé le livre en février 1996, tandis qu’Yves Rolland-Billecart, ancien PDG d’Air Afrique, y a laissé son empreinte à plusieurs reprises. Jean-Louis Dumas, patron d’Hermès, est passé en mai 1997, Mandé Sidibé, président du groupe Ecobank (et ancien Premier ministre du Mali), en novembre 2006.

Le monde de la communication et des médias est représenté, entre autres, par Gervais Mendo Ze (Radio-Télévision du Cameroun), Pius N. Njawe (Le Messager, Douala), Babacar Touré (Sud, Dakar), Robert Ménard, fondateur de Reporters sans frontières, Éric Rouleau (ancien du Monde), l’Américain Pierre Salinger, Jacqueline Baudrier, figure de l’audiovisuel français…

Autres célébrités, l’avocat Jacques Vergès, le professeur Christian Cabrol, pionnier de la greffe cardiaque, le commandant Azzedine, héros de la lutte de Libération algérienne, Théo Klein, ancien président du Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France), Stéphane Hessel, ambassadeur de France, Elie Barnavi, diplomate et historien israélien, Slim Chiboub, président de l’Espérance sportive de Tunis, Issa Hayatou, président de la CAF (Confédération africaine de football). La visite plus inattendue est celle, en juillet 1989, de Hadiza Amani, Miss Niger 1989.

Mais qu’écrit-on dans ce livre d’or, demandera le lecteur ? Des félicitations, des encouragements. Beaucoup de propos assez convenus, il faut le dire. À quelques exceptions près, la palme de l’originalité revenant au musicien camerounais Manu Dibango, qui a eu l’idée de remplacer le topo habituel par une petite partition… 

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires