Susan Rice

Ambassadrice des États-Unis à l’ONU

Publié le 10 décembre 2008 Lecture : 3 minutes.

Attention poids lourd ! Ces dernières années, les ambassadeurs à l’ONU ne pesaient guère dans l’administration américaine. Avec Susan Rice, 44 ans, nommée le 1er décembre, tout va changer. La preuve : elle aura rang de ministre – ce qui est nouveau. Du coup, l’un de ses prédécesseurs, le très républicain John Bolton, ne décolère pas : « On va donner trop d’importance à l’ONU et il y aura deux ministres des Affaires étrangères, Hillary Clinton et Susan Rice. » De fait, Hillary devra compter avec Susan. L’une connaît l’Afrique, l’autre pas. Et la future ambassadrice a son caractère.

Nous sommes en 1999, à Harare. Susan Rice, 35 ans, est déjà sous-secrétaire d’État aux Affaires africaines et rencontre un Laurent-Désiré Kabila très agacé par le soutien des États-Unis au Rwanda. Le tête-à-tête est long. Quatre heures. Puis le président congolais ressort, bougon, et lâche, d’un air las : « Cela n’a pas donné grand-chose. » Brillante, directe, un peu cassante quelquefois… L’ex-« Madame Afrique » de Bill Clinton est une femme dure à manœuvrer.

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Chez les Rice, tout commence par de bonnes études. Le père, Emmett, était administrateur à la Réserve fédérale, et la mère, Louise, professeure à Washington. La jeune Susan fréquente donc les meilleures écoles (Stanford, Oxford). Mais, chez les Rice, on sait aussi s’entourer de quelques amis influents, comme Madeleine Albright. En 1993, la future secrétaire d’État introduit la jeune diplômée auprès de Bill Clinton. Susan entre à la Maison Blanche. C’est le début d’une ascension fulgurante. Comme Barack Obama, Susan Rice refuse d’être enfermée dans le ghetto des Africains-Américains. Dans sa famille, le mot d’ordre est : « Ne jamais utiliser la race comme une excuse ou comme un avantage. » À l’université, la jeune femme tombe amoureuse d’un Canadien blanc, un futur producteur de télévision, avec qui elle aura deux enfants. « Je n’aime pas les préjugés, dit-elle, mais cela ne veut pas dire que je sois moins noire. » Susan Rice est comme ça. Pas facile à suivre et sans complexes.

Qu’est-ce qui l’anime ? « Ma foi dans les valeurs démocratiques », clame-t-elle. A contrario, elle n’aime pas les élections truquées, et elle le dit. En 1999, quelques mois après une présidentielle au Togo, elle confie à Jeune ­Afrique (J.A. n° 1982): « Ce qui s’est passé dans le Togo du président Eyadéma est particulièrement inquiétant. » Hors micro, elle n’hésite pas à comparer certains chefs d’État africains à des dinosaures. Avis aux fraudeurs et aux escrocs : avec elle, ils n’auront pas la vie facile.

Dans sa carrière, un fil rouge : son aversion pour le régime d’Omar el-Béchir. Après les attentats d’Al-Qaïda à Nairobi et à Dar es-Salaam, en 1998, elle est de ceux qui pressent Bill Clinton de faire bombarder l’usine d’El-Shifa, à Khartoum. « Elle mène une politique à guidage laser », disent alors les mauvaises langues. Depuis l’éclatement de la guerre au Darfour, elle fait feu de tout bois. Le 11 avril 2007, lors d’une audition devant le Sénat, elle lance : « Si le génocide continue au Darfour, il faut envisager une campagne de bombardement ou un blocus naval du Soudan avec l’aide de nos 1 500 soldats prépositionnés à Djibouti. » Sur l’échiquier politique américain, Susan Rice est de gauche, mais c’est la gauche tendance faucon…

Évidemment, quand elle a tenu ces propos, la diplomate était dans l’opposition et « pantouflait » à la Brookings Institution, un centre de recherches de Washington où sa mère avait travaillé. Demain, elle sera sans doute moins va-tâÂÂen-guerre. Toutefois, on devine sa jubilation le jour où la Cour pénale internationale a lancé une procédure contre le président soudanais. Le 29 novembre, à Doha, Nicolas Sarkozy a rencontré Omar el-Béchir. S’il lui a promis un gel de la procédure en échange de négociations au Darfour, il risque de se heurter au mur Susan Rice.

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La force de la future ambassadrice, c’est sa proximité avec le nouveau président. Dans l’establishment démocrate, elle a été l’une des premières à lâcher Hillary Clinton, dès 2007. Avec Anthony Lake, l’ancien patron du Conseil de sécurité nationale sous Bill Clinton, elle a élaboré le programme de politique étrangère du candidat Obama. Susan Rice va en bousculer plus d’un. Reste une inconnue : sa relation avec Hillary.

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