L’homme dans la cuisine
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Il est noir, il a côtoyé huit présidents et a passé beaucoup de temps à la Maison blanche. Son nom ? Eugene Allen, 89 ans. Jusqu’au 7 novembre, personne ou presque ne connaissait son existence. Et puis, un article du Washington Post l’a propulsé sur le devant de la scène. Son histoire a aussitôt séduit la productrice Laura Ziskin… et l’on imagine déjà Morgan Freeman endossant un costume de maître d’hôtel.
Dans les années 1940, Eugene Allen était serveur. D’abord, à Hot Springs (Virginie), puis dans un country club de Washington. C’est là qu’en 1942 il a rencontré Helene, sa femme, lors d’un dîner d’anniversaire.
En 1952, il apprend qu’un poste s’est libéré à la Maison Blanche. Il tente sa chance et est embauché. Pour 2 400 dollars par an, il va laver les assiettes, astiquer l’argenterie et s’occuper des toilettes. Il ne quittera les lieux que trente-quatre ans plus tard, six ans après avoir été promu maître d’hôtel. « Je n’ai jamais manqué un jour de travail », raconte-t-il.
L’homme dans la cuisine se souvient qu’à ses débuts, dans les années 1950, il n’avait pas le droit d’utiliser les toilettes publiques dans sa Virginie natale. À cause de sa couleur de peau. Mais des présidents qu’il a connus, il garde plutôt de bons souvenirs. Harry Truman l’appelait affectueusement « Gene ». Gerald Ford, avec lequel il discutait golf, était né le même jour que lui. Du coup, chaque fois que Ford fêtait son anniversaire, sa femme ne manquait jamais de s’exclamer en présence des invités : « C’est aussi l’anniversaire de Gene, aujourd’hui ! »
Le jour de l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy, Allen se trouve comme d’habitude dans sa cuisine. Invité à titre personnel aux funérailles, il choisit de rester à la Maison Blanche : « Il fallait bien que quelqu’un soit là pour servir tout le monde au retour de l’enterrement. »
Son meilleur souvenir, c’est peut-être au couple Reagan qu’il le doit. Un jour, Nancy se glisse dans les cuisines pour lui rappeler que l’hôte du prochain dîner est le chancelier allemand Helmut Kohl. Allen est fier de lui annoncer qu’il a pris de l’avance et que tout est déjà prêt. Il est complètement désarçonné quand la première dame lui annonce qu’il ne travaillera pas ce soir-là. Mais elle ajoute : « Vous êtes les invités du président et de moi-même ! » Pour une fois, assis avec ceux qui le boivent, Eugene ne sera pas celui qui sert le champagne…
Et pourtant, en ce début de novembre 2008, Helene et Eugene avaient prévu de voter démocrate. Sans hésitation, même s’ils n’osaient pas croire qu’un Noir puisse devenir président. Le 3 novembre, Helene est morte dans son sommeil. Le lendemain, Eugene a voté seul pour Barack Obama.
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