Mbeki-Tsvangirai : la guerre des mots
Déchu de son poste de président de la République sud-africaine, Thabo Mbeki n’avait plus que sa médiation au Zimbabwe pour tenter de redorer son blason. Il a une nouvelle fois échoué. À Pretoria, la dernière réunion entre les parties en conflit s’est achevée le 26 novembre sans qu’un accord soit conclu. Pis, Mbeki a été récusé par Morgan Tsvangirai, le chef de l’opposition zimbabwéenne.
Celui-ci a officiellement demandé à la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) la démission du médiateur. À l’en croire, « l’attitude » de Mbeki montre qu’il « n’a pas compris à quel point la situation au Zimbabwe est désespérée ». En avril, Tsvangirai avait déjà demandé, en des termes il est vrai plus diplomatiques, qu’il soit déchargé de la médiation.
La lettre de Tsvangirai est une réponse à une longue missive que le médiateur lui a envoyée il y a quelques jours. Sur dix pages, Thabo Mbeki se plaignait de l’attitude du leader de l’opposition envers les chefs d’État de la région. Visiblement vexé d’avoir été traité de « lâche » par Tsvangirai, qui a également qualifié de « nullité » la position de la SADC, le président Mbeki lui a fait savoir qu’il attendait de lui un peu plus de respect. « Ce genre de comportement vous ouvrira les gros titres dans les journaux mais ne changera rien à la situation au Zimbabwe », lui a écrit l’ancien chef de l’État.
Dans sa lettre, Mbeki fait aussi souvent référence au fait que l’opposant semble attendre plus des puissances occidentales que des voisins africains.
Les relations entre l’ancien chef de l’État et l’opposition zimbabwéenne ont toujours été marquées par une profonde défiance. L’Afrique du Sud est en effet longtemps apparue comme une alliée sûre de Mugabe. Alors que le Zimbabwe s’enfonçait, lentement mais sûrement, dans la crise, que les opposants se faisaient tabasser, que la nourriture manquait, que les écoles, les hôpitaux et tous les services publics tombaient en déliquescence, Mbeki s’est obstiné à mettre en œuvre une « diplomatie discrète », qui a surtout servi de prétexte à ne rien faire.
Morgan Tsvangirai, parce qu’il a été aidé financièrement par les fermiers blancs du Zimbabwe et a entretenu de bons rapports avec le gouvernement britannique, n’a jamais eu les faveurs de Thabo Mbeki.
Héros de l’indépendance et grand pourfendeur du néocolonialisme, le tonitruant Robert Mugabe impressionnait autant les foules que les chefs d’État amenés à le côtoyer. S’opposer à lui, c’était s’exposer à ses foudres, courir le risque de passer pour un complice des « impérialistes occidentaux ». Pour ne rien arranger, Mbeki n’a jamais apprécié le chef de l’opposition zimbabwéenne, qui, comme ceux qui l’ont chassé du pouvoir au mois de septembre, est issu du monde syndical.
Le seul à oser condamner Mugabe est le président du Botswana, Ian Khama. Résolu à isoler totalement le Zimbabwe, ce dernier a, le 26 novembre, fermé ses frontières et demandé à ses voisins de faire de même. Les Botswanais sont convaincus que, privé d’essence, Mugabe ne pourra tenir bien longtemps.
Pendant ce temps, le choléra fait des ravages : près de 400 morts et quelque 9 000 malades. Près de la moitié de la population a le plus urgent besoin d’une aide alimentaire.
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