Ces enfants 
qui tuent

Alors que l’on assiste à une recrudescence des enfants-soldats en RD Congo, Johnny Mad Dog sort en salles, en France. Un film tourné au Liberia avec d’anciens jeunes combattants. Retour sur ces vies brisées.

Publié le 4 décembre 2008 Lecture : 2 minutes.

Dans l’est de la République démocratique du Congo, chaque semaine, de nouveaux petits soldats sont recrutés par les différents groupes armés. Au Darfour, ils sont des centaines à subir un entraînement intensif pour lutter contre les milices djandjawids. Il y a quelques années, ils amputaient leurs ennemis en Sierra Leone. Arrachaient le cœur de leurs victimes au Liberia.

Avant d’incarner Johnny Mad Dog dans le film du même nom, primé à Cannes dans la catégorie Un certain regard, Christopher a été l’un d’eux, tout comme Dagbeh (« No Good Advice »), ou Barry (« Small Devil »). Ils sont aujourd’hui acteurs d’un film qui n’est finalement pas une fiction. Ils jouent devant les caméras une guerre qu’ils ont jouée, pour de vrai.

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L’ONU estime qu’ils sont environ 300 000 dans le monde, 120 000 en Afrique. Moyenne d’âge : 14 ans.

Leur enfance s’est achevée brutalement quand, un jour, souvent après avoir assisté au meurtre de leurs parents ou été contraints de les abattre eux-mêmes, avoir vu le viol de leur sœur ou le saccage de leur village, ils ont été recrutés par un des mouvements rebelles qui sévissent sur le continent. Ils sont des généraux de pacotille, des porte-flingues ou des porteurs d’eau, les filles sont parfois des combattantes, et le plus souvent jouets sexuels, esclaves à tout faire.

Le film de Jean-Stéphane Sauvaire, qui sort sur les écrans français le 26 novembre, est tiré du livre d’Emmanuel Dongala, Johnny Chien Méchant. L’écrivain congolais raconte le destin d’un de ces enfants sauvages dans une guerre absurde contre les « Mayis dogos ». Une guerre où le tribalisme n’est que le masque sordide des ambitions politiques de chefs que les enfants ne voient jamais.

Johnny tue, viole, mais il n’est pas comme les autres chiens de guerre. Il a fréquenté l’école jusqu’au CE1, et, contrairement aux autres, son cerveau, dit-il, « fonctionne même quand [il] ne le [fait] pas fonctionner ». Il attend la fin de la guerre, lui « l’intellectuel », pour toucher sa récompense et commencer une nouvelle vie.

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Laokolé, 16 ans, trimballe sa mère cul-de-jatte dans une brouette (elle en a 13 dans le film et c’est son père qui est infirme), fuit devant l’avancée des rebelles. Elle est au lycée, elle veut plus tard construire des maisons, son père était maçon, elle aimerait être architecte.

Le destin de ces deux enfants, si différents et pourtant si liés, se mêle tout au long de cette histoire qui pourrait se passer au Congo, en Sierra Leone, en Ouganda ou ailleurs. Tous les jours, des combattants à peine plus grands que leurs fusils-mitrailleurs sont embarqués dans une sanglante aventure.

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Comment un gosse, victime d’une guerre qui ne le concerne pas, peut-il devenir une machine à tuer ? Lui reste-t-il une lueur d’humanité ? Un enfant- soldat peut-il vivre avec ses cauchemars une fois la guerre terminée ? Peut-il devenir un adulte comme un autre ? Comment se reconstruire après pareils traumatismes ?

Des questions qui ont été abordées le 18 novembre dans un débat autour du film, animé par Jeune Afrique en présence de la secrétaire d’État française aux Droits de l’homme, Rama Yade ; de Marie-Rose Moro, psychiatre spécialiste de l’enfance ; d’Éric Pitois, de Médecins sans frontières ; et de Jean-Stéphane Sauvaire, le réalisateur du film.

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