Coup pour coup
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En s’attaquant à Berté Seydou, un modeste Ivoirien réfugié en France, Simone Gbagbo tape dans le mille. Le 16 avril 2004, ledit Seydou était l’un des chauffeurs de Jean-Tony Oulaï, le chef du commando armé soupçonné d’avoir enlevé le journaliste français Guy-André Kieffer sur le parking d’un supermarché d’Abidjan. Et, depuis un an, ce témoin parle. Le soir de l’enlèvement, il affirme avoir vu Kieffer vivant dans l’une des villas d’Oulaï. Il ajoute qu’à la même époque la première dame ivoirienne aurait été en contact téléphonique avec Oulaï…
Berté Seydou n’est pas le premier témoin à charge dans la longue enquête du juge français Patrick Ramaël, mais il donne des détails que les enquêteurs sont en mesure de vérifier. Depuis un an, il ne varie pas d’un iota dans ses déclarations. C’est sans doute la raison pour laquelle, en juin dernier, quatre magistrats ivoiriens débarquent en France, rendent visite à Patrick Ramaël et soumettent l’ancien chauffeur à un long interrogatoire au Palais de justice de Paris. Seydou maintient ses propos.
Le 10 juillet, quand le magistrat français convoque à Paris comme témoins Simone Gbagbo et Paul-Antoine Bohoun Bouabré, le ministre du Plan, ceux-ci ne répondent pas et la première dame contre-attaque. Le 15, elle porte plainte en diffamation contre Berté Seydou pour faux témoignage. En septembre, nouvelle convocation pour le mois suivant. Et nouvel échec. Le 17 octobre, la justice ivoirienne lance un mandat d’arrêt international contre Berté Seydou (on ne l’a appris que le 19 novembre).
Comme celui-ci vient d’obtenir en France le statut de réfugié, il semble impossible que la Côte d’Ivoire obtienne son extradition. Mais, grâce à cette initiative, le pouvoir ivoirien fait coup double.
1. Le principal témoin du juge Ramaël est maintenant sous pression.
2. Les magistrats ivoiriens disposent d’un prétexte s’ils souhaitent entraver l’enquête de leur collègue français en Côte d’Ivoire.
En fait, par le biais de ce mandat d’arrêt, les autorités ivoiriennes changent de stratégie. Fini l’époque où elles faisaient le gros dos devant les investigations du juge Ramaël. Aujourd’hui, elles tentent de rendre coup pour coup. Ont-elles été inspirées par le magistrat sénégalais qui, en septembre, a lancé un mandat d’arrêt contre le juge français qui instruit le naufrage du Joola ? Possible. Mais quatre ans et demi après le rapt de Guy-André Kieffer, le magistrat ne lâche pas prise. Commentaire de Bernard Kieffer, le frère du disparu : « Je suis content de voir que le juge persévère. Un jour ou l’autre, il faudra bien que madame Gbagbo et monsieur Bohoun Bouabré répondent à sa convocation, en France ou ailleurs. »
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