Le manque de main-d’oeuvre qualifiée est criant

 Christine Heuraux est directrice de l’appui à la formation à EDF.

Publié le 2 juillet 2013 Lecture : 3 minutes.

Alors qu’elle concentre 15 % de la population mondiale, l’Afrique présente le taux moyen d’électrification le plus bas de la planète et ne compte que pour 3 % de la consommation mondiale d’électricité. Première explication de ce déficit : le manque d’investissements chronique dans les infrastructures. Mais on oublie souvent de citer un facteur aggravant bien identifié par les compagnies d’électricité, celui des besoins criants en compétences pour l’ensemble des métiers de la filière, et à tout niveau de qualification. Une faiblesse à moitié résolue, du moins pour l’Association des sociétés d’électricité d’Afrique (Asea), qui s’est emparée du problème en travaillant avec l’Agence française de développement (AFD) à la création de centres d’excellence pour couvrir ses besoins en formation.

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Reste malheureusement un laissé-pour-compte de taille : l’ensemble des 585 millions d’Africains qui n’ont toujours pas accès à l’électricité et dont les trois quarts vivent en milieu rural, où le taux d’électrification ne dépasse pas 12 % en moyenne. De nombreux États ont choisi de déléguer cette mission de service public à des opérateurs privés. Ils sont souvent épaulés par de grandes institutions internationales (AFD, Banque mondiale, Union européenne, etc.), qui contribuent au financement de ces programmes d’électrification. Reste que si les pays concernés – et leurs bailleurs – étudient attentivement les aspects institutionnels et réglementaires, les choix technologiques, les modèles économiques et les besoins en financement associés à tout programme d’électrification rurale n’ont pas été pensés pour structurer des filières de professionnalisation adaptées à ces métiers émergents. Lesquels s’exercent dans des conditions bien différentes de celles des compagnies nationales d’électricité, et leurs opérateurs doivent assurer simultanément des fonctions de techniciens, de commerciaux, de gestionnaires comptables, voire de formateurs auprès d’une clientèle fragile.

L’électrification rurale exige une formation ciblée pour tous les métiers du secteur.

Or le sujet mérite qu’on s’y intéresse : apporter l’électricité aux millions de personnes qui en sont encore dépourvues suppose à l’évidence une qualification massive des différents acteurs. Il faut donc concevoir des politiques de qualification professionnelle qui garantissent une filière de qualité en l’inscrivant dans la durée. Engagé depuis près de vingt ans dans l’électrification rurale en Afrique, EDF a entendu cette forte demande de formation et de montée en compétences, tant des opérateurs publics que privés. À la tête d’un groupement de neuf partenaires – dont l’Agence malienne pour le développement de l’électrification rurale (Amader), le Fonds de développement de l’électrification du Burkina Faso (FDE), l’Institut international d’ingénierie de l’eau et de l’environnement (2iE) -, l’entreprise française a lancé fin 2011, grâce au financement de l’Union européenne et au concours de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), un projet intitulé Aide à la formation initiale et continue aux opérateurs et acteurs de l’électrification rurale en Afrique de l’Ouest, qui se déroule dans deux pays pilotes, le Mali et le Burkina Faso.

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Au-delà de l’accès à une énergie moderne – autre que le charbon de bois, la bougie et le pétrole lampant, qui prévalent encore en milieu rural – se dessine un autre enjeu de taille : de 7 à 12 millions de jeunes Africains arrivent sur le marché du travail chaque année. Cette jeunesse recèle un immense potentiel qu’il faut adapter aux besoins de ce marché et du développement économique. Or le milieu rural, qui représente plus de 60 % de la population subsaharienne, reste particulièrement demandeur d’emplois. La démarche entreprise pour former aux métiers de l’électrification rurale peut se dupliquer dans quantité d’autres secteurs : services d’approvisionnement en eau ou de téléphonie, artisanat, diversification et transformation des produits et activités agricoles ou forestiers… Il y faudra bien sûr des moyens financiers, une coordination entre les nombreux acteurs concernés, mais aussi et avant tout une volonté et une vision politiques qu’il revient à chaque pays de se forger… ainsi qu’une réelle capacité à innover.

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