Question de respect
Médiateur de la République du Bénin, ancien ministre
Bien sûr, l’Afrique entière exulte ! Bien sûr, tous ceux que la vie et l’Histoire ont révoltés depuis des siècles, tous ceux qui ont appris à douter de leur humanité en observant le regard des autres sur eux, tous les nègres méprisés et humiliés ont été émus jusqu’aux larmes à l’annonce de la victoire de Barack Obama. Le combat de générations entières est ainsi conforté et reconnu.
Aimé Césaire, il y a cinquante ans déjà, et jusqu’à sa mort, n’avait qu’un vœu – son testament : « Laissez entrer les peuples noirs sur la grande scène de l’Histoire ! »
Aujourd’hui, c’est fait. Le pays de la ségrégation, qui punissait les esclaves en les jetant aux chiens, ce même pays donne aujourd’hui la seule vraie leçon d’humanisme qui vaille. Il n’y a plus ni Juifs, ni gentils, ni Noirs, ni Arabes… Il n’y a, aux États-Unis, que des Américains, des hommes et des femmes qui se battent pour la vie et, pour cela, se font respecter. Pour en arriver là, il a fallu lutter durement, résister et ne pas faire de concession. Il a fallu Martin Luther King, tragiquement sacrifié sur l’autel d’où rayonne désormais le triomphe de Barack Obama.
Dans son Livre vert, Mouammar Kadhafi a rédigé un chapitre aussi bref que saisissant sous le titre provocateur : « Les Noirs régneront sur le monde. » Le nègre Obama étant désormais président de l’État le plus puissant du monde, le Guide libyen peut y voir la réalisation de sa « prophétie ». Mais notre combat – celui d’Obama, de Mandela, de Césaire et des autres – n’est pas dirigé vers la conquête du monde ; il est de nous libérer des entraves qui nous empêchent d’agir et de conquérir la fraternité universelle. Obama nous donne l’exemple de cette libération qui passe par l’organisation, le respect d’autrui, la valorisation de notre intelligence et la prise au sérieux de notre démocratie, dans la bonne gouvernance.
Ce que signifie la victoire d’Obama – notre victoire –, c’est la chance pour chacun d’entre nous de recevoir le respect qui lui est dû. En réussissant à se surpasser et à entraîner les autres dans un progrès collectif, nous pouvons tous devenir des Obama. Or l’Afrique a mal à sa gouvernance. Le peuple, souffrant et privilégiant des apparences trompeuses, est trop souvent ignoré. L’argent est confisqué au détriment des masses sans éducation et sans soins. Et les mauvaises pratiques démocratiques provoquent des désordres meurtriers.
L’exemple d’Obama nous donne une chance : celle de faire surgir une négritude de conquête qui force le respect et l’admiration et fasse prospérer la cogestion des affaires de ce monde. Car, désormais, les affaires du monde sont aussi nos affaires.
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