En attendant Barack Obama…

Le président élu des États-Unis hérite d’une situation totalement bloquée. Beaucoup le pressent d’agir sans délai en nommant un envoyé spécial au Moyen-Orient habilité à négocier au nom de la prochaine administration.

Publié le 1 décembre 2008 Lecture : 4 minutes.

Condoleezza Rice, la secrétaire d’État de l’administration Bush, a fait, la semaine dernière, un autre de ses très inutiles voyages au Moyen-Orient, le huitième depuis la conférence d’Annapolis de novembre 2007, et fort probablement le dernier. La question qui se pose est : pourquoi ces déplacements répétés ? Rice s’est montrée infatigable, mais elle n’a pas obtenu le moindre résultat.

Le président élu Barack Obama va-t-il relever le défi et remettre en route le processus de paix au Moyen-Orient ? Plutôt que d’attendre son entrée en fonctions officielle, le 20 janvier 2009, beaucoup le pressent d’agir sans délai et de nommer un envoyé spécial au Moyen-Orient habilité à négocier au nom de la prochaine administration. La candidature de l’ex-président Bill Clinton a été évoquée. Un meilleur candidat pourrait être Colin Powell, ancien secrétaire d’État et ancien chef d’état-major général des armées.

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Les pays arabes, quant à eux, ont été déçus et alarmés par la nomination comme secrétaire général de la Maison Blanche de Rahm Emmanuel, un Américain d’origine israélienne, connu pour ses sympathies pour l’État hébreu. Aux yeux des Arabes, cette nomination donne à penser qu’Obama ne fera pas une priorité de l’interminable conflit israélo-arabe ou des souffrances des Palestiniens.

Trêve fragile

Annapolis, la conférence que le président George W. Bush a organisée l’an dernier, devait permettre de créer un État palestinien à la fin de 2008. La perspective d’une telle création a pratiquement disparu. Bush et l’infortunée Condoleezza Rice se retrouvent dans une situation bien pire que l’an dernier. En toute impunité, Israël a accéléré sa politique de confiscation de territoires et d’expansion de la colonisation, et poursuivi la construction de la « barrière de sécurité » et de routes réservées aux colons en terre palestinienne. Depuis Annapolis, Israël a détruit 94 logements palestiniens dans le Jérusalem-Est, arabe, et 235 autres logements palestiniens en Cisjordanie occupée. À Gaza, la vie quotidienne a été totalement bouleversée par le blocus israélien. La population est paralysée par la pauvreté, la sous-alimentation, la maladie et le chômage. Quatre-vingts pour cent des Gazaouis dépendent pour leur survie de l’aide alimentaire, et les enfants souffrent de malnutrition chronique et d’anémie. Après une visite à Gaza, l’autre semaine, Mary Robinson, la première femme présidente de l’Irlande (1990-1997), ex-haut commissaire des Nations unies pour les droits de l’homme, a déclaré : « Leur civilisation tout entière est en train de disparaître. »

Quant à la trêve entre Israël et le Hamas négociée avec les Égyptiens, elle ne tient qu’à un fil. Israël l’a violée sans vergogne, l’autre semaine : les soldats israéliens ont fait une incursion à Gaza pour faire sauter un tunnel orienté, selon eux, vers le territoire israélien. On craignait qu’il ne soit utilisé pour enlever des soldats de Tsahal. Six combattants du Hamas ont été tués. Le Hamas a riposté en tirant cinquante roquettes sur le Néguev, qui n’ont fait ni victimes ni dégâts matériels.

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Responsabilité arabe

Tony Blair, représentant du Quartet − les États-Unis, l’ONU, l’Union européenne et la Russie, qui ont proposé « la feuille de route » pour la paix −, s’est montré tout aussi inefficace que Condoleezza Rice elle-même. Il n’a pas levé le petit doigt pour Gaza. Mais il a appelé « la nouvelle administration américaine à prendre à bras-le-corps ce dossier sans délai. Les fondations existent, on peut construire dessus. Mais pour construire, il faut aborder le processus de paix comme un enjeu majeur non pas seulement pour la région mais pour le monde, et ce dès les premiers jours de l’entrée en fonctions de la nouvelle administration. » Le lundi 10 octobre, Rice a eu une réunion à Charm el-Cheikh, sur la mer Rouge, avec des représentants du Quartet et des Égyptiens. Mais elle avait déjà reconnu que les pourparlers de paix étaient interrompus et que l’État palestinien devait attendre que « les circonstances politiques soient favorables ».

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Les Arabes ont leur part de responsabilité dans l’enlisement du processus de paix et le martyre des Palestiniens. Contrairement à Israël, qui mène depuis des décennies une infatigable campagne tous azimuts pour peser sur l’opinion publique américaine et sur les administrations successives − faisant l’impossible pour que soient nommés des sympathisants aux postes clés du gouvernement −, les Arabes sont restés largement passifs.

Ces dernières années, ils n’ont pas cherché à utiliser politiquement leurs considérables ressources financières pour défendre leurs frères palestiniens. Ils ont préféré placer leur argent dans des entreprises occidentales − comme ces investisseurs du Golfe qui ont pris récemment une participation considérable dans Barclays Bank − plutôt que d’exercer une influence politique.

Les Arabes ne semblent pas comprendre que la ruine des espoirs palestiniens de créer un État viable n’apportera à la région que la violence et l’instabilité, et que ce sera une défaite pour le monde arabe tout entier.

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