Pendant ce temps, Bemba…
Poursuivi pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité par la Cour pénale internationale, le président du MLC prépare sa défense depuis sa cellule â¨de La Haye. Et entend bien rester le chef de l’opposition congolaise.
Le 4 novembre, Jean-Pierre Bemba a fêté son 46e anniversaire et la victoire de Barack Obama derrière les barreaux, au quartier pénitentiaire de la Cour pénale internationale (CPI), dans la banlieue de La Haye, aux Pays-Bas. Cellule individuelle, salle de prière, installations sportives (courts de tennis et piscine), Internet, télévision, journaux : à la CPI, le chef du Mouvement de libération du Congo (MLC), premier parti d’opposition en RD Congo (61 députés), est mieux logé que dans bien des hôtels de Kinshasa. « Son moral est au beau fixe et sa santé est bonne », confie son ancien directeur de cabinet, Fidèle Babala, qui lui fait un « briefing quotidien » au téléphone sur la situation du pays. Mais le confort ne suffit pas à tromper l’attente de l’ex-chef de guerre et ancien vice-président durant la période de transition (2002-2006). Jean-Pierre Bemba a été arrêté le 23 mai dernier à Bruxelles (où il possède une maison), après l’émission par la CPI d’un mandat d’arrêt international pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Luis Moreno-Ocampo, le procureur, le soupçonne d’être responsable d’exactions – notamment des viols – commises par ses hommes en Centrafrique, où, en 2002-2003, son mouvement est venu porter secours au chef de l’État de l’époque, Ange-Félix Patassé, alors menacé par une rébellion. Après une vaine série d’appels et de recours intentés par ses conseils, Jean-Pierre Bemba a été transféré à La Haye le 3 juillet. Le lendemain, il a comparu pour la première fois au cours d’une audience purement formelle, destinée à vérifier son identité et à s’assurer qu’il a été informé de ses droits et des crimes qui lui sont reprochés. Et depuis, rien. Prévu pour le 4 novembre, le prochain rendez-vous a finalement été reporté au 8 décembre. Lors de cette audience de confirmation des charges, la Cour décidera, en présence du procureur, de représentants des victimes, du prévenu et de ses avocats, si le dossier – 7 000 pages – comporte suffisamment de preuves pour qu’un procès ait lieu. En vue de cette séance, publique, les quatre avocats de Jean-Pierre Bemba ont préparé une ligne de défense. Arguments principaux : la responsabilité des exactions revient au pays qui a accueilli les troupes, en l’occurrence la Centrafrique ; les exactions proprement dites, le MLC les a déjà punies. théorie du complot Pour son clan, le chef du MLC est un « prisonnier politique » victime d’un complot entre Kinshasa et le procureur de la CPI. Ses partisans en veulent pour « preuve » le moment de son arrestation, quelques jours avant l’élection du porte-parole de l’opposition, poste auquel il prétendait. « Ce n’est pas le droit qui est appliqué, c’est une main politique qui agit de chez nous, à Kinshasa, pour éliminer un opposant », accuse un proche. Autres éléments nourrissant la théorie du complot : le report de l’audience de confirmation des charges, « preuve » que l’enquête n’est pas aboutie et que l’arrestation a été précipitée ; et le fait qu’Ange-Félix Patassé ne soit pas inquiété par la CPI. Des arguments jugés « fantaisistes » par le bureau du procureur. Dans le discours officiel du MLC, Jean-Pierre Bemba n’est pas parti pour toujours. La formation vit dans l’espoir du retour du « guide », refusant d’envisager ouvertement un procès. L’autorité et le charisme du personnage continuent d’opérer. Ses ennuis judiciaires joueraient même en sa faveur. « La carte de la victimisation attire une certaine sympathie au MLC », estime une source au sein d’un autre parti d’opposition. Mais si un procès devait avoir lieu, cette sympathie pourrait s’éroder. Et la place du président, déjà convoitée, pourrait devenir vacante (conformément aux statuts du parti, l’empêchement de Jean-Pierre Bemba est pour le moment considéré comme temporaire). Reste que, avec l’exil forcé de Jean-Pierre Bemba, l’opposition est privée de son principal leader. Malade, Étienne Tshisekedi, président de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) et pourfendeur invétéré du régime de Mobutu Sese Seko, a déserté la scène politique après avoir boycotté les législatives et la présidentielle de 2006. Autre handicap pour l’opposition : ses divisions. En raison de multiples querelles et rivalités, le poste de porte-parole, prévu par la Constitution, n’a toujours pas été pourvu ; et son règlement intérieur, toujours pas adopté. Une situation qui, selon un observateur, laisse un « boulevard » pour Joseph Kabila dans la perspective du scrutin de 2011.
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