Vraie-fausse libération

Publié le 1 décembre 2008 Lecture : 2 minutes.

À l’aube du 13 novembre, trois pick-up du Bataillon de la sécurité présidentielle (Basep) et un véhicule civil s’arrêtent dans la bourgade endormie de Lemden (200 km au sud-est de Nouakchott). À bord de l’un des véhicules, un célèbre passager : Sidi Ould Cheikh Abdallahi, accompagné d’un membre de la junte qui l’a renversé, le 6 août, le colonel Mohamed Ould Meguett, inspecteur général des Forces armées. Trois heures auparavant, le cortège avait quitté le Palais des congrès, à Nouakchott, où « Sidi » était détenu depuis sa chute. Lemden, dans les dunes de Brakna, est sa ville natale. Désormais, c’est son nouvel exil.

Le général Ould Abdelaziz, qui en a pris la décision, n’a fait aucun commentaire à propos de ce transfert. Son gouvernement n’était pas au courant. La famille de Sidi et les chancelleries, non plus. À l’heure où ces lignes étaient écrites, le chef de la junte ne s’était toujours pas exprimé sur le sujet. Difficile, dans ces conditions, de deviner quel régime va être appliqué à l’ancien président.

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Dès son arrivée au village, l’enfant de Lemden a pu téléphoner à ses proches – qui lui ont tous trouvé bon moral – et prier à la mosquée. En fin d’après-midi, le défilé dans la maison familiale a commencé. Parmi les visiteurs venus saluer Sidi, les présidents de l’Assemblée nationale (Messaoud Ould Boulkheir) et du Front national pour la défense de la démocratie (Mohamed Ould Maouloud). Mouvement et relations sociales : deux « luxes » dont le plus célèbre détenu mauritanien était privé au Palais des congrès. Après trois mois d’isolement complet, celui-ci a même pu renouer avec la politique, réunir ses partisans et donner à Al-Jazira une interview au cours de laquelle il a estimé être le « président légitime ».

Mais sa liberté de mouvement est limitée à son village natal, isolé de tout. « Ce n’est pas une libération, c’est de la poudre aux yeux », estime Mohamed Ould Maouloud. Un « bannissement », considère un proche.

Il y a un mois, le Conseil de l’Union européenne (UE) et la Commission européenne, premier bailleur de fonds de la Mauritanie, ont lancé un ultimatum à la junte : si, à la date du 20 novembre, rien n’a été fait en vue du rétablissement de l’ordre constitutionnel – qui implique évidemment la libération de Sidi Ould Cheikh Abdallahi –, la coopération sera suspendue.

Complètement démuni (selon une source, la Société mauritanienne d’électricité aurait été sollicitée pour un emprunt), le régime ne peut se permettre de perdre son partenaire privilégié et se devait de faire un geste. Mais personne n’est dupe. À Paris (la France préside actuellement le Conseil de l’UE), les responsables ont pris connaissance avec circonspection de cette « bonne nouvelle en demi-teinte » et continuent de réclamer le « retour à l’ordre constitutionnel ».

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