Pour une vraie réforme du FMI

Rachid Sfar Ancien Premier ministre de la République tunisienne et ancien ministre de l’Économie et des Finances

Publié le 30 novembre 2008 Lecture : 3 minutes.

Le 15 novembre 2008 est un jour qui fera date : pour la première fois, les chefs d’État et de gouvernement des pays du G20 se réuniront pour discuter des solutions à apporter à la crise financière internationale. Cette réunion est un rendez-vous à ne manquer sous aucun prétexte. Le monde doit être plus solidaire. Les pays qui participeront à cette réunion devront agir comme mandataires des intérêts de leur région géographique d’origine et faire prévaloir l’intérêt collectif sur leurs intérêts particuliers.

Le G20 devra véritablement prendre en compte les nécessités spécifiques de la relance économique dans tous les pays et pas uniquement dans ceux considérés aujourd’hui comme les « moteurs » ou les « locomotives » de l’économie mondiale. Les grands travaux pour la relance, il en faut pour tous. Messieurs les représentants des pays dits riches, permettez à un citoyen du monde de vous rappeler qu’un financement concessionnel adéquat pour des investissements dans les infrastructures et la production notamment agricole et industrielle – judicieusement choisis et bien exécutés dans des pays qui représentent les deux tiers de l’humanité –, constituent l’une des principales solutions à une relance durable et structurelle dans vos propres pays aujourd’hui en récession.

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Nous devons faire preuve de créativité et d’imagination pour dégager les financements sains et appropriés en faveur des pays en développement et des nations émergentes. J’avais proposé en 1999 de faire jouer un rôle accru aux Droits de tirage spéciaux (DTS) du FMI pour un financement approprié du développement. Cette idée avait été reprise dans le rapport présenté aux chefs d’État participant à la conférence organisée par l’ONU à Monterrey (Mexique), en 2002, un document rédigé par un comité des sages coprésidé par le Français Jacques Delors et le Koweïtien Abdelatif El Hamed. Un rapport malheureusement resté lettre morte.

Les circonstances présentes m’incitent à réitérer ma proposition aujourd’hui. Car il est devenu urgent d’envisager la possibilité d’une création monétaire internationale régulée et maîtrisée, placée sous l’égide d’un FMI new-look, afin de pouvoir financer la relance de l’économie réelle et la poursuite du développement des deux tiers de l’humanité. Cela passe par une réforme des statuts du Fonds, qui se verrait confier la mission de surveillance et de régulation du marché financier international. Il serait autorisé à émettre annuellement et automatiquement au profit de son fonds de réserve et d’intervention des montants de DTS ne dépassant pas 1 % du PIB mondial. Ainsi, les DTS acquerraient le statut d’une véritable monnaie de réserve et de règlement des échanges de biens et services, au même titre que le dollar, l’euro ou le yen. Et pourraient être détenus tant par les banques centrales que par les grandes banques internationales. En plus de ses interventions actuelles relativement lentes et fortement conditionnelles, le FMI serait autorisé à intervenir au jour le jour, comme un prêteur en dernier ressort, au profit des Banques centrales des pays n’étant pas dotés de monnaie de réserve propre. Ces facilités seraient bien entendu accordées à des taux inférieurs à ceux du marché financier international et adaptées aux situations de chaque pays.

Une autre piste, suggérée cette fois par le président Zine el-Abidine Ben Ali, consisterait à prélever une taxe de 1 dollar par baril de pétrole exporté, et une autre sur les exportations d’armes, afin de doter le Fonds mondial de solidarité qui a été créé, à son initiative, en 2002 par les Nations unies. Une dotation qui sera utilisée en priorité pour appuyer les programmes nationaux d’aide à l’emploi des jeunes et au microcrédit.

C’est au G20 de tracer les grandes lignes d’une réforme radicale du système monétaire et financier international et de donner l’impulsion politique. Mais la rédaction d’une convention internationale monétaire et financière proprement dite devra, elle, émaner d’une Commission des sages indépendante. Et le projet ne saurait entrer en vigueur avant d’avoir été approuvé par les différentes instances délibératives du système des Nations unies…

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