Un Obama africain, 
est-ce possible ? 


Publié le 30 novembre 2008 Lecture : 3 minutes.

L’élection de Barack Hussein Obama à la présidence américaine est une révolution et un symbole. Mais elle ne se résume pas à l’élection d’un Noir à la Maison Blanche. Car l’homme que les électeurs de la première puissance du monde ont choisi de porter à la magistrature suprême est bien plus que cela. C’est un sang-mêlé. Le fils d’un étudiant kényan et d’une Américaine du Kansas. Un métis. Obama n’est ni un descendant d’esclave ni un fils d’immigrant – fût-il de souche africaine –, venu goûter aux délices du rêve américain. C’est un citoyen du monde, un enfant de couple mixte, né à Hawaii et ayant passé une partie de son enfance en Indonésie. Et ces signes particuliers, loin d’atténuer la signification de sa victoire, lui confèrent au contraire une portée véritablement universelle.

En France, 15 % des mariages célébrés en 2006 – un mariage sur six – étaient des mariages « mixtes », entre conjoints de nationalité française et étrangère. Des dynamiques similaires quoique moins marquées sont observées en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas, anciennes puissances impériales européennes aujourd’hui à l’avant-garde d’un vaste mouvement global de métissage. En Afrique, 17 millions de migrants de l’intérieur sont officiellement recensés, dont 7,5 millions dans la seule Afrique de l’Ouest. Et la fréquence des mariages mixtes est plus élevée qu’ailleurs.

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Mais les Africains, qui ont célébré dans l’allégresse l’élection du sénateur Obama, seraient-ils, pour autant, prêts à faire preuve d’autant d’audace que les Américains, et à confier les rênes du pouvoir à un enfant de couple mixte ? Pas nécessairement. Ne serait-ce que parce que leurs Constitutions ne le permettent pas toujours…

Le Continent a connu au moins deux présidents métis : le Ghanéen Jerry Rawlings, né d’un père écossais, et le Togolais Nicolas Grunitzky, né d’un père allemand. Mais les deux sont arrivés au pouvoir à la suite d’un coup d’État, même si Rawlings a ensuite été confirmé par les urnes. En théorie, un « Obama africain » est possible au Kenya, en Afrique du Sud, au Cameroun, au Gabon, au Congo-Brazzaville, au Bénin, ou encore au Mali. Les Constitutions de ces pays, d’inspiration universaliste, permettent à tout candidat de concourir du moment qu’il possède la nationalité.

De même, la Loi fondamentale sénégalaise offre la possibilité à Karim Wade, le fils du président Abdoulaye Wade et né de mère française, de se présenter en 2012, comme beaucoup lui en prêtent l’ambition.

La Constitution de la RD Congo précise qu’un candidat à la présidentielle doit posséder la nationalité congolaise d’origine (NDLR : être congolais de naissance), mais ne dit rien de la nationalité des parents. Jean-Pierre Bemba Gombo, dont le père était métis portugais, a été autorisé à concourir en octobre 2006 et s’est hissé au second tour. L’actuel président du Sénat, deuxième personnage de l’État, Léon Kengo wa Dondo, est fils d’un médecin juif polonais devenu belge…

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Les Constitutions ivoirienne et malgache interdisent à tout individu dont un des deux parents ne posséderait pas la nationalité d’origine de se porter candidat à la fonction suprême. Les dispositions de l’article 35 de la loi fondamentale ivoirienne ont d’ailleurs été invoquées en 2000 pour écarter l’ancien Premier ministre Alassane Ouattara, au motif qu’il se serait prévalu dans sa jeunesse de la nationalité burkinabè.

C’est au Maghreb que les critères d’éligibilité sont les plus draconiens. En Algérie, l’article 73 de la Constitution de 1996 spécifie que tout candidat à la magistrature suprême doit être algérien d’origine, de confession musulmane, attester de la nationalité algérienne de son conjoint, s’il est marié, et justifier de sa participation à la guerre d’indépendance s’il est né avant juillet 1942. Dans le cas contraire, le candidat doit prouver la non-implication de ses parents dans des actes « hostiles à la Révolution ». Une rédaction qui marque un durcissement par rapport au texte de 1989, qui n’imposait que deux conditions : « l’algérianité » et la religion islamique. Enfin, en Tunisie, l’article 38 de la Constitution précise que seuls les candidats musulmans, jouissant exclusivement de la nationalité tunisienne, et « de père, de mère, de grands-pères et de grands-mères paternels et maternels tunisiens, tous demeurés tunisiens sans discontinuité » sont autorisés à se présenter.

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