Interminable dialogue de sourds
Les deux parties ne parviennent toujours pas à s’entendre sur une solution à la crise née du coup d’État du 6 août.
Cela fera bientôt trois mois. Trois mois que la Mauritanie et ses partenaires européens discutent, se menacent et s’excèdent mutuellement. Trois mois qu’ils n’arrivent pas à s’entendre sur une solution à la crise née du renversement, le 6 août dernier, du président Sidi Ould Cheikh Abdallahi (aujourd’hui en résidence surveillée) par le général Ould Abdelaziz. Le face-à-face du 20 octobre, à Paris, a encore fourni un bel exemple de cet interminable dialogue de sourds. On retrouve, côté mauritanien, Moulaye Ould Ahmed Laghdaf, nommé Premier ministre par Ould Abdelaziz le 14 août. Pour l’occasion, il s’est notamment fait accompagner de Mohamed Mahmoud Ould Mohamedou, que le général a placé à la tête des Affaires étrangères, et de Mohamed Lemine Dadde, commissaire aux Droits de l’homme. En face, les premiers rôles sont tenus par Louis Michel, commissaire européen au Développement, et Alain Joyandet, secrétaire d’État à la Coopération, qui représente la présidence, française, du Conseil de l’Union européenne (UE). Pour Ould Ahmed Laghdaf et son équipe, l’enjeu est de maintenir la coopération avec Bruxelles (156 millions d’euros prévus pour la période 2008-2013). Il leur faut, pour cela, convaincre leurs interlocuteurs que le régime de Ould Abdelaziz est fréquentable. Principal argument qu’ils déroulent à la partie adverse : des « états généraux de la démocratie » seront prochainement organisés, au cours desquels société civile et hommes politiques de tous bords prendront des décisions sur des sujets essentiels, notamment les dates de la libération de Sidi Ould Cheikh Abdallahi et de l’élection présidentielle, ainsi que la possibilité pour les membres de la junte militaire d’être candidats. « La feuille de route que tout le monde attend doit être décidée par tous les Mauritaniens », justifie Mohamed Lemine Dadde, interrogé par Jeune Afrique. Mais pour le camp européen, la promesse de ce « forum » national ne suffit pas. La seule garantie valable, c’est la libération sans condition de Sidi Ould Cheikh Abdallahi et sa participation à la recherche d’une solution. Une garantie que Nouakchott refuse de donner. La rencontre du 20 octobre n’a donc été que l’occasion d’un constat : chaque partie campe sur ses positions. « Nous n’avons pas avancé d’un pouce », témoigne une source présente ce jour-là. Le Conseil et la Commission ont donné un mois à Ould Abdelaziz et ses hommes pour faire de nouvelles propositions. En attendant, chaque camp se rassure en affirmant que « rien n’est encore perdu ».
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