Le retour de Mehdi
Figure historique de la gauche islamique radicale, â¨Mehdi Karroubi annonce sa candidature â¨à l’élection présidentielle de juin 2009.
Il aura été le premier à sortir du bois. Mehdi Karroubi, 71 ans, figure historique de la gauche islamique radicale et considéré aujourd’hui comme le champion des « réformateurs pragmatiques », a annoncé, le 12 octobre, son intention de se présenter à la présidentielle de juin 2009. Farouche détracteur de Mahmoud Ahmadinejad, cet habile tacticien jouit de solides appuis à l’intérieur du système. Étudiant et disciple de Khomeiny, il a dirigé la puissante Fondation des martyrs avant d’accéder une première fois, en 1989, à la présidence du Parlement, le Majlis, poste qu’il occupera jusqu’en 1992.
Marginalisé par Hachemi Rafsandjani, président entre 1989 et 1997, Karroubi retrouve une certaine influence après l’élection du réformateur Mohamed Khatami, membre du clergé comme lui, et affilié à son parti charnière, l’Association des religieux combattants (ARC). Il profite des divisions des partisans de Khatami pour s’emparer à nouveau du perchoir en mai 2000. Au printemps 2005, il tente sa chance à la présidentielle et arrive en troisième position, derrière Rafsandjani et Ahmadinejad. S’estimant lésé, il dénonce des résultats manipulés, appelle malgré tout à voter pour Rafsandjani, mais démissionne de toutes ses fonctions officielles. Six mois plus tard, il annonce le lancement d’une chaîne de télévision satellitaire, Saba TV, basée à Dubaï, pour « casser le monopole de l’État sur l’information ». Les autorités iraniennes mettent leur veto, et le projet tombe à l’eau. L’épisode permet néanmoins au hodjatoleslam Karroubi, qui n’a pas toujours été exempt de compromissions, de cultiver son image de libéral. Nullement découragé, il fonde, en janvier 2006, un quotidien, Etemad-é-Melli (« confiance nationale »), très critique à l’endroit du pouvoir.
Sa candidature à la présidentielle est donc tout sauf une surprise. Ahmadinejad, qui briguera probablement un second mandat, est affaibli. La situation économique, avec une inflation de 29 %, est calamiteuse. Ses sorties outrancières sur Israël et sur l’Holocauste, jugées inutilement provocatrices, ont braqué une bonne partie des hiérarques iraniens. Karroubi, qui s’en est nettement démarqué et qui prône une détente avec les États-Unis, a dans ces conditions une jolie carte à jouer. Mais c’est un dinosaure qui n’incarne pas forcément le changement. La constitution d’une grande coalition ratissant large et réunissant ses partisans, ceux de Khatami et de Rafsandjani augmenterait significativement ses chances de victoire. Au-delà de ces combinaisons politiques, deux inconnues de taille pèsent sur le scrutin et rendent hasardeux tout pronostic : l’attitude du Guide, Ali Khamenei, l’arbitre suprême, qu’on dit plutôt acquis aux ultraconservateurs, et le degré de mobilisation des électeurs. Le taux de participation est en chute libre depuis 2004, et cette désaffection a jusqu’ici plutôt fait le jeu des radicaux.
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