Un choix très politique

Publié le 13 novembre 2008 Lecture : 2 minutes.

L’attribution, le 13 octobre, du prix Nobel d’économie à l’universitaire américain Paul Krugman est une incontestable claque décochée par l’Académie suédoise au capitalisme sauvage, responsable du cataclysme financier qui s’est poursuivi la semaine dernière et qui est en train de malmener l’économie mondiale. Né en 1953 à Long Island, près de New York, titulaire d’un doctorat du fameux Massachusetts Institute of Technology (MIT), Krugman enseigne l’économie et les affaires internationales à l’université de Princeton. Il se voit récompensé par les Nobel pour « avoir montré les effets des économies d’échelle sur les modèles du commerce international et la localisation de l’activité économique ». Au-delà du jargon, c’est un vrai chercheur ayant mis son talent au service de ses convictions politiques qui se trouve ainsi ­distingué. Très vite, le jeune Krugman refuse les théories classiques selon lesquelles la spécialisation des pays les conduirait à vendre les produits pour lesquels ils sont les plus performants. Il démontre que la concurrence entre les pays est « imparfaite », parce qu’elle est perturbée notamment par l’innovation. Mais ce partisan de la mondialisation (voir son livre La mondialisation n’est pas coupable) va évoluer parce qu’il se découvre foncièrement de gauche. Ou plutôt « liberal », comme on dit en Amérique. Pour lui, « les statistiques ne sont utiles que si elles éclairent la condition humaine ». Il s’intéresse aux sujets sociaux les plus divers. Mieux, il accepte à partir de 1999 de tenir une chronique bihebdomadaire dans le New York Times, où ce grand pédagogue parvient à rendre limpides les rouages de l’économie. Il en profite pour tirer à boulets rouges sur Bush et son administration, qui avantagent outrageusement les riches et saignent la classe moyenne américaine – laquelle, écrit-il, « s’évanouit à toute allure ». Il dénonce la faillite de la guerre en Irak et les complicités du pouvoir avec les puissances d’argent. Partisan de Barack Obama, il n’en a pas moins applaudi la décision de Bush, le 14 octobre, de consacrer 250 milliards de dollars à la nationalisation partielle des banques américaines en difficulté : « Pour la première fois, j’ai le sentiment qu’il y a une politique qui imprime sa marque sur la crise. Nous n’allons pas revenir à Karl Marx, mais redécouvrir ce que Franklin Roosevelt avait découvert il y a soixante-quinze ans », c’est-à-dire qu’il est désastreux de laisser les marchés se débrouiller seuls. Ses convictions sont affichées dans son dernier livre, L’Amérique que nous voulons (Flammarion, 2008) : « Je crois, écrit-il, à une société relativement égalitaire, soutenue par des institutions qui limitent l’extrême richesse et l’extrême pauvreté. Je crois à la démocratie, aux libertés civiles et à l’État de droit. C’est ce qui fait de moi un libéral et j’en suis fier. » 

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