Le roi, les femmes, la politique
« Nous appelons à une collaboration constructive entre le gouvernement et le Parlement en vue de la mise en place de mécanismes renforçant la présence des femmes dans les conseils communaux », a déclaré Mohammed VI lors de l’ouverture de la session parlementaire d’automne, le 10 octobre à Rabat, avant de prendre la pause au milieu de députées ravies de tant de sollicitude. Avec 0,54 % d’élues locales, 1,1 % de femmes à la Chambre des conseillers et 10,8 % à celle des représentants, le Maroc occupe une peu reluisante 94e place au palmarès mondial de la parité hommes-femmes en politique. Sur les 325 sièges du Parlement mis en place en septembre 2007, on ne recense que 34 femmes. Encore la grande majorité de celles-ci ont-elles été élues sur la « liste nationale » présentée par l’ensemble des partis depuis l’instauration, en 2002, d’un quota minimum de 10 % de femmes. Seules quatre d’entre elles ont été désignées par le suffrage populaire : Yasmina Baddou (Istiqlal), Latifa Jbabdi (Union socialiste des forces populaires), Fatiha Layadi (du futur Parti authenticité et modernité) et Fatna Lkhail (Mouvement populaire). Lors des élections municipales de 2003, c’était pire encore. Les femmes ne représentaient que 5 % du total des candidats ; une seule (Asmae Chaâbi) avait été élue maire. Ce phénomène peut s’expliquer, entre autres, par le machisme persistant, le manque d’intérêt des femmes pour la chose publique, le conservatisme foncier de l’électorat… « Longtemps, les femmes ont été marginalisées. En 1998, le gouvernement Youssoufi (USFP) a engagé des réformes, de grands pas ont été accomplis, mais, bien sûr, il faut continuer », explique l’istiqlalienne Samira Koraïche, belle-fille d’Allal El Fassi, le dirigeant historique du parti. L’Istiqlal revendique aujourd’hui 50 000 adhérentes et l’USFP un peu moins. Quant au Parti de la justice et du développement (PJD), il estime qu’environ 20 % de ses membres sont des femmes. Ces chiffres sont certes jugés peu crédibles par de nombreux observateurs, mais sans doute témoignent-ils néanmoins d’une volonté d’ouverture. Ainsi, le PJD et l’Istiqlal organisent chaque année, avec la participation de leurs meilleurs cadres féminins, des caravanes à travers le pays pour tenter de sensibiliser et de mobiliser les Marocaines. « Nous organisons aussi un forum réunissant 250 jeunes filles ayant le potentiel pour devenir des leaders », explique Abdelaziz Rebbah, secrétaire général de l’organisation de jeunesse du parti islamiste. « Beaucoup reste à faire, confirme la Dr Touria Cherki, députée du Mouvement populaire et présidente du Forum des femmes parlementaires. Nous demandons que, sur chaque liste pour les municipales, un tiers des places, et au moins une des trois premières, nous soient réservées. » La requête ne semble pas soulever l’enthousiasme des partis. « Ce serait déjà bien si le quota de 20 % proposé par notre comité exécutif était respecté », explique un cadre de l’Istiqlal. Même son de cloche au PJD, où l’on explique que la féminisation du parti est en effet une priorité, mais que « la qualité et l’intégrité des candidates sont plus importantes que leur nombre ». Le Forum des femmes parlementaires organisera prochainement une série de rencontres avec le monde associatif en vue de rédiger et de proposer des amendements à la charte pour les municipales et au nouveau code électoral en cours de préparation. « Nous allons tenter de sensibiliser le chef du gouvernement et le ministère de l’Intérieur, qui pilote le projet de nouveau code », précise Touria Cherki.
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