Afrique : Ecobank veut tirer parti de la crise européenne
Dans la tourmente, les banques du Vieux Continent devraient réduire leurs crédits aux sociétés de négoce. Libérant ainsi un terrain que le groupe panafricain Ecobank compte bien investir.
La crise de la dette qui sévit en Europe et qui malmène les principales banques du Vieux Continent est en passe de produire son premier effet (indirect) en Afrique. Contraintes de renforcer leurs fonds propres, les banques européennes devraient lever le pied sur le financement des activités d’import-export de matières premières et de produits de base, un secteur qui pourrait alors connaître de graves problèmes en 2012. Les spécialistes tablent sur un resserrement de 25 % à 30 % des crédits accordés aux sociétés de négoce. Le coût du crédit devenant plus élevé, les importateurs pourraient répercuter la hausse sur leurs prix. Et, au final, pénaliser les consommateurs.
230 milliards d’euros : c’est le montant que BNP Paribas, Crédit agricole et Société générale veulent économiser d’ici à 2013.
Place vacante
Déjà, BNP Paribas, Crédit agricole et Société générale, les principaux établissements qui financent ce secteur – avec plus de la moitié des prêts accordés –, ont décidé de réduire significativement la voilure. Ils veulent économiser environ 300 milliards de dollars (près de 230 milliards d’euros) dans ce domaine d’ici à 2013. Le montant total des crédits accordés par ces établissements en Afrique et au Moyen-Orient approche les 500 milliards de dollars par an, selon une récente étude du pôle recherche du groupe Ecobank Transnational Incorporated (ETI). Les analystes affirment que les banques occidentales se concentreront, l’an prochain, sur leurs plus gros clients (Cargill, Glencore…). « Les acteurs de taille plus modeste devraient faire une croix sur toute possibilité d’obtenir un crédit en 2012 », a même déclaré au Financial Times le patron d’une société de négoce.
Le terrain cédé par les établissements européens devrait être rapidement occupé par les institutions financières asiatiques (notamment chinoises), mais aussi par des établissements africains. Et en la matière, ETI, qui vient de former un lien capitalistique avec le quatrième groupe bancaire sud-africain, Nedbank, avance ses pions. Sa filiale française, EBI SA, spécialisée dans le financement des opérations des multinationales en Afrique et des sociétés africaines commerçant avec l’Europe, vient de porter son capital social de 20 à 50 millions de dollars pour se donner plus de moyens.
Restructuration
Présidé par le Gabonais Christophe Jocktane-Lawson, EBI SA, qui a démarré ses activités en juin 2009, multiplie les initiatives pour monter en puissance. « Nous ciblons les activités des grands groupes comme Glencore, Vitol ou encore Trafigura, dont les besoins de paiement à l’international sont importants », affirme Christophe Bourland, le directeur général d’EBI SA.
Outre le financement des échanges intercontinentaux, ETI mise sur le commerce régional, qui a représenté 86,2 milliards de dollars en 2010, l’équivalent de 10,9 % des échanges de toute l’Afrique subsaharienne avec le reste du monde. Là aussi, le groupe entend profiter de la restructuration bancaire qui s’opère en Europe et qui devrait se traduire par le retrait de groupes étrangers d’Afrique de l’Ouest.
Nous ciblons les activités des grands groupes comme Glencore, Vitol ou encore Trafigura.
Christophe Bourland, directeur général d’EBI SA
Mais Ecobank a-t-il les moyens de ses ambitions ? Paul-Harry Aithnard, le directeur du département recherche du groupe, répond par l’affirmative. « D’abord, indique-t-il, l’acquisition récente de la banque nigériane Oceanic Bank a permis de renforcer notre assise financière, avec un total de bilan [cumulé, NDLR] de près de 18 milliards de dollars. Ensuite, l’assise géographique du groupe [32 pays] est un véritable atout. » Un atout suffisant ? ETI devra compter avec les autres banques africaines, notamment avec celles d’Afrique du Sud. Mais l’enjeu est de taille.
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