Bénin : au-delà des apparences
Bénin : Boni Yayi II ou l’éloge de la rigueur
Les apparences sont parfois trompeuses. Le Bénin fait figure de modèle démocratique dans les manuels d’histoire, qui rappellent à raison l’héritage de la Conférence nationale de 1990. Il est immanquablement cité lorsqu’il s’agit de lister les rares alternances politiques menées sans fracas sur le continent.
Il suscite enfin une légitime admiration, car la joute politicienne sur les bords de la lagune se décline toujours avec virulence, mais dans le respect de la Constitution – que l’on ne bricole pas. Alors qui sont aujourd’hui les véritables artisans et les dignes héritiers de cette tradition ?
La classe politique ? Des ministres performants, des ténors de haut niveau et des intellectuels brillants occupent avec talent les premiers rangs. Mais derrière le rideau, les députés adeptes de la mallette pour voter une loi sont si nombreux que le président Boni Yayi n’avait pas jugé utile de se constituer un groupe parlementaire durant son premier mandat.
Cela ne servait à rien puisque, au final, il fallait payer. Autant, dans ces conditions, gouverner par ordonnances et décrets ; cela coûte moins cher. Un élu du peuple se vantant devant un ambassadeur en poste à Cotonou du tarif pratiqué dans les allées de l’Assemblée nationale donnait raison au chef de l’État. Espérons que la confortable majorité présidentielle issue des dernières élections législatives puisse mettre un terme à ces scandaleuses pratiques.
De ce point de vue, la responsabilité des deux formations politiques – Forces cauris pour un Bénin émergent (FCBE) et Renaissance du Bénin (RB) – structurant cette nouvelle période, Yayi II, est lourde. À leurs leaders de ne pas décevoir.
Les opérateurs économiques sont-ils plus vertueux ?
Il suffit d’aller se promener au port de Cotonou ou de discuter avec des patrons du secteur privé, désespérés par le comportement de confrères et la voracité de certains fonctionnaires, pour se faire une idée.
La 175e place sur 183 pays dans le classement « Doing Business 2012 » de la Banque mondiale sur l’environnement des affaires est également une grave anomalie pour un pays où règne la liberté. Le coût de ces faiblesses structurelles est élevé. Le port et les douanes (la moitié des recettes de l’État) ne sont pas les leviers au développement qu’ils devraient être.
Ils se rendent aux urnes, mais leur situation n’évolue guère.
L’instituteur, le piroguier, la ménagère et le paysan ont de bonnes raisons, dans ces conditions, de se sentir trahis. Ils créent la richesse, mais gagnent peu. Ils se rendent aux urnes, mais leur situation n’évolue guère. Le Bénin pourrait bien ainsi rejoindre la trajectoire des vieilles démocraties européennes et se trouver menacé dans ses équilibres par un populisme rampant teinté de régionalisme. Les tribuns de pacotille sont prêts, leur redoutable rhétorique déjà en place. Aux véritables hommes d’État de travailler et de cesser d’invoquer sans cesse un glorieux passé pour mieux dissimuler les turpitudes du présent. La Conférence nationale n’est pas un pactole dans lequel on peut puiser. Mais un butin qu’il faut protéger.
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