Le réchauffement climatique est un assassinat

Tosi Mpanu Mpanu est président du groupe africain des négociateurs sur le climat.

Publié le 14 décembre 2011 Lecture : 3 minutes.

La vie de 1 milliard d’Africains est aujourd’hui en danger. Sur un continent où plus des deux tiers des actifs dépendent, pour leur survie, du secteur agricole, la stabilité du climat est cruciale.

Or nous voyons les périodes de sécheresse se prolonger, les inondations se multiplier et la météo se dérégler. Pour les agriculteurs du Sahel, qui ont déjà des difficultés à se nourrir, un réchauffement de plus de deux degrés (ce que nous n’arriverons vraisemblablement pas à empêcher) est synonyme de mort. Il faut malheureusement s’attendre à ce que la pénurie en eau qui frappe cette région jette les populations sur les routes et provoque des conflits.

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Pour les petits pays insulaires, comme le Cap-Vert, les Seychelles, São Tomé e Príncipe ou Maurice, c’est au contraire la montée des eaux qui menace de faire des centaines de milliers de réfugiés. Les régions côtières du golfe de Guinée sont également concernées. Alors que le continent marque des points dans sa lutte contre les épidémies comme le paludisme, le changement climatique risque de remettre en question ces succès en provoquant l’extension des zones infestées et la contamination de celles qui, en altitude, étaient jusque-là préservées.

Pourtant, nous, Africains, n’avons contribué qu’à hauteur de 4 % aux émissions de gaz à effet de serre depuis le début de la révolution industrielle. Les pays développés portent la responsabilité historique des drames climatiques de notre continent. Ce n’est pas là de l’anti­occidentalisme primaire, mais une réalité objective, attestée par les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), dont la plupart des membres sont des Occidentaux.

Les pays africains sont désormais unis autour des mêmes positions dans toutes les négociations sur le climat. Il faut évidemment faire en sorte que les émissions de CO2 diminuent. C’est indispensable. L’objectif est clairement défini : les pays développés doivent réduire, d’ici à 2020, leurs émissions d’au moins 40 % par rapport à leur niveau de 1990, et, d’ici à 2050, de 80 % à 95 %. Ils doivent également faire des efforts d’adaptation. De leur côté, les États africains doivent, quand cela leur est possible, préférer les énergies renouvelables aux énergies fossiles. Nous ne devons pas répéter les erreurs des nations du Nord en empruntant le même chemin excessivement polluant.

Nous, Africains, n’avons contribué qu’à 4% des émissions de gaz à effet de serre depuis le début de la révolution industrielle.

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Tout cela ne doit pas se faire, et ne se fera pas, au détriment de la croissance économique et de la réduction de la pauvreté. Nous le rappelons à certains pays riches tentés d’instrumentaliser le débat climatique pour empêcher les puissances émergentes de les rattraper.

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Pour ouvrir cette nouvelle voie vers un développement durable en Afrique, les pays occidentaux doivent absolument limiter le coût des technologies « propres ».

Car le second front sur lequel nous devons livrer bataille est celui du financement. Les discussions sur le Fonds vert, promis l’année dernière à Cancún, ne progressent pas, et les financements à démarrage rapide (« fast start ») institués à Copenhague se sont révélés un marché de dupes. Sur les 30 milliards de dollars [22,4 milliards d’euros, NDLR] promis pour la période 2010-2012, moins de 3 milliards ont effectivement été déboursés.

La conférence sur le climat qui vient de s’achever à Durban, en Afrique du Sud, n’a malheureusement laissé aucune place au doute : le réchauffement climatique se poursuit. Il est désormais urgent de prendre des mesures pour adapter nos sociétés à cette nouvelle donne avant qu’elles ne subissent un terrible choc. Cela relève de la responsabilité des gouvernements africains. Mais c’est justement via leur mode de développement polluant, dont les Africains n’ont pas fini de payer les conséquences, que les pays du Nord ont acquis les moyens et les connaissances qui permettraient de limiter la casse. Ils ont le devoir d’agir, dès aujourd’hui. 

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