Côte d’Ivoire : le cas Gbagbo

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Publié le 12 décembre 2011 Lecture : 2 minutes.

Pour ses partisans, le transfèrement de Laurent Gbagbo à La Haye, siège de la Cour pénale internationale (CPI), est une pilule plus qu’amère. D’abord, sur le plan symbolique : la CPI serait une « affaire de Blancs », preuve que ce sont bien eux qui ont organisé la chute de leur idole, contre la volonté du peuple ivoirien. Ensuite, en raison du caractère apparemment inique d’une telle décision: pourquoi lui seulement ? Enfin, parce que son jugement serait forcément biaisé. 

Inlassablement, le noyau dur de ses fidèles déverse la même antienne, véritable cache-sexe d’un régime pourtant peu défendable,de l’avis même de ceux qui y ont participé avant de s’en éloigner, tel l’ex-président de l’Assemblée Mamadou Koulibaly. « Ouattara, le cheval de Troie de la France et des États-Unis », « justice des vainqueurs », « néocolonialisme », « exécution politique d’un résistant »… Certains vont même chercher dans les livres d’histoire des parallèles pour le moins osés : Gbagbo est le Lumumba du XXIe siècle, celui qui a payé le prix fort pour sa résistance héroïque à ces Blancs qui maintiennent le continent sous leur joug.

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Pour eux, Gbagbo, Kadhafi ou Mugabe sont des héros, des saints ou des martyrs. Mais que diable ont-ils donc fait pour leurs pays, en dehors de leur fameuse « résistance », qui se discute largement pour les deux premiers cités dès lors que l’on s’intéresse à autre chose qu’à leur rhétorique compassée, pour mériter un tel dévouement ? En quoi le comportement des « vainqueurs » exonère-t-il Gbagbo des crimes dont il est inculpé ? Pourquoi n’a-t-on pas le droit de s’interroger sur l’exécution de Gueï et de sa famille, sur les disparitions, les assassinats, les escadrons de la mort, le pilonnage à l’arme lourde d’Abobo, les massacres nocturnes, les expéditions punitives menées un peu partout dans Abidjan, le drame du Novotel, voire tous ceux qui ont été évités de justesse?

Le dessous des cartes

Compte tenu du passé et du passif de la France et d’autres puissances occidentales en Afrique, il est naturel, et même souhaitable, de s’intéresser aux dessous des cartes, d’identifier leurs objectifs réels et les moyens qu’ils utilisent pour y parvenir. De même qu’il va de soi que la question de la responsabilité ou de la culpabilité de ceux qui, dans le camp d’Alassane Ouattara, ont commis des exactions doit également être posée et étudiée avec impartialité. La CPI n’a d’ailleurs jamais dit le contraire. Jugeons-la donc sur ses actes. La procédure ne fait que commencer. La Côte d’Ivoire a besoin de ce procès. Pour savoir, comprendre et aller au fond des choses plutôt que de se focaliser sur les contre-feux lancés par des partisans à la mémoire sélective et au cynisme nauséabond. Gbagbo pourra s’y défendre, certainement mieux qu’en Côte d’Ivoire, s’expliquer. La justice des vainqueurs n’est certes pas propice à la réconciliation. Mais le déni est bien pire…

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