Allemagne : le paradoxe Merkel
Après Nicolas Sarkozy à Toulon, c’est au tour d’Angela Merkel, le mercredi 2 décembre, de présenter devant le Bundestag ses proposition pour sortir l’Europe de la crise. Très respectée sur la scène internationale, la chancelière allemande Angela Merkel l’est paradoxalement de moins en moins dans son pays : sa popularité est en berne, et sa politique suscite un flot de critiques. Explications.
Pour le magazine américain Forbes, Angela Merkel est « la femme la plus puissante du monde ». En juin dernier, Barack Obama lui a remis la Médaille présidentielle de la liberté, la plus haute distinction civile américaine. Tout récemment, la crise de l’euro lui a permis d’imposer ses vues à l’Europe entière. Bref, la chancelière Angela Merkel occupe le devant de la scène internationale. Sur le plan économique, son bilan est par ailleurs flatteur : bonne tenue des exportations, croissance proche de 3 %, chômage en baisse, gestion exemplaire des déficits…
Paradoxe : elle n’en tire aucun profit sur le plan intérieur. Selon les derniers sondages, seuls 39 % des Allemands souhaitent qu’elle accomplisse un troisième mandat. Pis, 46 % d’entre eux tirent un bilan négatif de sa gestion de la crise. En août, ils étaient même une large majorité à douter de ses capacités à y faire face.
Dates clés
17 juillet 1954
Naissance à Hambourg, passe sa jeunesse en Allemagne de l’Est.
1990
Entrée en politique
1991-1998
Plusieurs fois ministre
1998
Prend la tête du CDU
Depuis 2005
Chancelière
Volte-face. Tout avait pourtant bien commencé pour cette physicienne de formation, qui, à 51 ans, fut la plus jeune chancelière de l’histoire. Tout au long de son premier mandat, sa cote de popularité se maintint au zénith. À la tête d’une coalition droite-gauche, elle fit preuve d’un art consommé du compromis et profita des retombées des réformes engagées par Gerhard Schröder, son prédécesseur.
Mais, depuis son alliance avec les libéraux du FDP, sa politique des petits pas et ses volte-face à répétition agacent. « Son double virage sur l’énergie [annonce d’une prolongation du nucléaire, puis, quelques mois plus tard, de son arrêt définitif, NDLR] restera comme le plus spectaculaire slalom de l’histoire politique allemande », critique l’hebdomadaire Focus. De même, pour ménager à la fois ses électeurs et ses amis du FDP opposés au sauvetage de la Grèce, elle a longtemps hésité à s’engager dans la crise de l’euro, avant de s’y résoudre par crainte d’un effondrement économique. Quelques mois plus tôt, son refus d’intervenir en Libye lui avait valu de nombreuses critiques.
La vérité est que la chancelière est embarrassée par sa coalition avec le FDP, très eurosceptique et conservateur, mais qu’elle n’a pas le choix : même si ce parti est aujourd’hui en pleine débandade, elle ne peut se passer des quelques pour cent qu’il recueille encore au niveau national. Elle est en outre confrontée à des dissensions au sein de son propre camp. Pour elle, l’année qui s’achève aura été électoralement désastreuse : lors de toute une série d’élections régionales et locales, la CDU, son parti, a perdu de nombreux sièges au Bundesrat (Conseil fédéral), qui doit être consulté pour toutes les décisions.
Pour tenter de remonter la pente, Merkel tente d’engager une nouvelle politique sociale : construction de crèches, instauration d’un salaire minimum, etc. Son objectif est double : regagner les électeurs perdus et lancer un appel du pied en direction des sociaux-démocrates (SPD) et des Verts en vue d’une éventuelle future coalition.
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