Algérie : bouquet en vue pour l’audiovisuel
Les téléspectateurs algériens pourront bientôt zapper sur des chaînes privées. Plusieurs projets attendent la promulgation d’une loi sur la libéralisation de l’audiovisuel.
Printemps arabe : les médias font leur révolution
Le 15 avril 2011, après des semaines de tensions politiques, Abdelaziz Bouteflika adresse un discours à la nation pour annoncer le lancement de réformes. Dans le secteur des médias, le président algérien se prononce pour une ouverture de l’audiovisuel au privé. Ce premier acte, bien que symbolique, signe la fin prochaine du monopole de l’État sur les « médias lourds ». Il intervient vingt ans après la libéralisation de la presse écrite.
Le 12 septembre, le Conseil des ministres approuve un projet de loi organique relative à l’information. Le texte propose la création d’une « autorité de régulation », une sorte de CSA, qui aura pour mission d’élaborer les cahiers des charges et de signer des « conventions » avec les sociétés algériennes de droit privé. Le gouvernement décide toutefois de consigner l’ensemble des dispositions régissant l’activité des télévisions et des radios dans une loi spécifique. Celle-ci est actuellement en cours d’élaboration.
Effet d’annonce
La publication du communiqué du Conseil des ministres suffit à déclencher une déferlante de projets de création de chaînes de télévision. En l’espace de quarante-huit heures, l’opinion publique découvre les acteurs du futur paysage audiovisuel algérien. El-Watan, El-Khabar, Liberté, Le Temps, Echourouk… les sociétés éditrices de nombreux titres de presse écrite sont les premières à ouvrir le bal. Elles sont suivies par l’homme d’affaires Djilali Mehri (photo ci-dessus, © Agostino Pacciani) qui projette de lancer un bouquet de chaînes thématiques. Quelques jours plus tard, l’économiste Abderrahmane Mebtoul annonce la création d’Algérie Internationale Monde Plus, une télévision dont le capital sera ouvert aux étrangers. À cela s’ajoutent les ambitions affichées des patrons Issad Rebrab (photo ci-dessus), du premier groupe privé (Cevital), et Ali Haddad (photo ci-dessous, © Zebar pour J.A.), le champion du BTP (ETRHB).
Pour Amar Bakhouche, ancien directeur de l’information à la télévision publique, les initiateurs de ces projets agissent dans la « précipitation ». « Le monopole imposé par l’État est tel qu’il a provoqué une frustration. Ces annonces sont une forme de libération. » Sceptique, il estime que peu de projets parviendront à terme. « Les futures chaînes privées devront engager des sommes colossales pour recruter, former du personnel et acquérir du matériel. Mais elles seront surtout obligées de patienter pour espérer un retour sur investissement », ajoute Amar Bakhouche.
Questions d’argent
Habib Benramdane, directeur de l’agence Drive Communication, considère que la réussite des chaînes privées dépendra des programmes qu’elles proposeront. « Les annonceurs sont aujourd’hui à la recherche de nouveaux supports. La presse écrite a fini par montrer ses limites en termes d’audience. Pour attirer la publicité, les télés devront miser sur la qualité des programmes et des contenus, car il est inconcevable d’aller vers des chaînes payantes. »
Du côté des parlementaires, les préoccupations sont totalement différentes. Selon Moundji Djoudi, député, membre de la Commission de l’information et journaliste de profession, le plus important est « d’interdire l’entrée de l’argent sale dans les médias lourds ». « Nous tentons de sortir du monopole de l’État, mais nous ne devons pas pour autant laisser des businessmen mettre la main sur ce secteur », insiste-t-il. Moundji Djoudi est persuadé que la télé de demain sera dirigée par des « réseaux mafieux » si elle échappe à l’État et aux journalistes.
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