Sadok Belaïd : la révolution tunisienne, « un point de non-retour »
Ancien doyen de la faculté de droit de Tunis, Sadok Belaïd milite pour un équilibre et une stricte séparation des pouvoirs.
Constituante tunisienne : les enjeux d’une élection historique
Jeune Afrique : Quel regard portez-vous sur la classe politique tunisienne ?
Sadok Belaïd : Elle ne se distingue ni par sa clarté ni par une adéquation avec la situation de la Tunisie. L’ambition des partis est de se positionner sur la scène politique ; ils négligent la Constituante et ses enjeux. Par ailleurs, le manque de poigne du pouvoir ne facilite pas la tâche. Il n’empêche, le processus des élections est mis en place, cahin-caha nous arriverons à la terre promise de la Constituante. Nous aurons alors une assemblée légitime pour commencer à construire quelque chose de plus stable malgré la surenchère des partis politiques, qui seront de toute façon mis à l’épreuve durant les travaux de l’Assemblée.
Comment percevez-vous l’éveil politique des Tunisiens ?
C’est assez contradictoire. Nous avons affaire à une opinion publique étonnante, très éveillée, qui a pris au bond la balle de la révolution. Mais une autre partie de la population est attentiste, un peu utopiste et naïve. Elle croit que tout est dû et tout de suite. Sur ce plan, le gouvernement n’a pas été très imaginatif pour recréer la confiance. La démocratisation d’un pays est un processus lent.
Quels devraient être les piliers de la future Constitution ?
Malgré les polémiques, il existe un certain consensus autour de valeurs communément admises et il n’y a pas vraiment d’autre formule que celle de l’article premier pour définir la Tunisie [« La Tunisie est un État libre, indépendant et souverain ; sa religion est l’islam, sa langue l’arabe et son régime la république », NDLR]. Les droits de l’homme, les libertés et la dignité, la justice sociale, la notion de démocratie participative ont inspiré la révolution tunisienne. C’est un point de non-retour. Pour respecter ces principes, la nouvelle Constitution doit instaurer l’État de droit au sens strict du terme. Il faut aussi se prémunir contre toute forme d’abus politique et adopter un régime qui équilibre les pouvoirs sans bloquer le système. Ensuite, il convient d’envisager un nouveau découpage territorial pour assurer le développement des régions tout en leur donnant plus d’autonomie. Enfin, pour ne pas rater la révolution, il est essentiel que la Constitution soit ratifiée par un référendum populaire.
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Propos recueillis à Tunis par Frida Dahmani
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