Chine : la dictature du bistouri
Un récent sondage révèle que 80 % des jeunes filles chinoises envisagent de subir une opération de chirurgie esthétique pour… trouver un emploi. Sois belle et travaille !
Mei Li n’a que 21 ans, mais, dans la salle d’attente de l’hôpital Badachu, elle est déjà une habituée. « C’est ma troisième opération, explique cette jeune Pékinoise en minijupe et talons hauts. Je me suis déjà fait refaire le nez et les yeux. Maintenant, je voudrais une poitrine plus jolie. » Mei Li a déjà dépensé l’équivalent de 1 000 euros. « Il faut être belle pour réussir », estime-t-elle.
À Badachu, plus de 500 patients consultent quotidiennement. « Ce sont surtout des étudiantes, explique un responsable de l’hôpital. Mais on reçoit de plus en plus de jeunes garçons. » Il existe en Chine plus de 50 000 cliniques pratiquant la chirurgie esthétique. Officiellement, 3 millions de Chinois se sont fait opérer en 2009 – chiffre en constante augmentation. Un récent sondage révèle que 80 % des jeunes filles souhaitent se faire opérer pour trouver un meilleur emploi. « Cette génération née dans les années 1980-1990 est composée d’enfants uniques. Leurs parents ont beaucoup investi en eux. Ils veulent être les meilleurs, les plus beaux, les plus riches, explique le sociologue Jiang Yan, de l’Université de Pékin. Subir une opération est ici parfaitement naturel. On se fait débrider les yeux pour ressembler à une Occidentale. La mode vient de Corée du Sud, où toutes les jeunes filles ont recours à la chirurgie. Elles pensent que cela leur permettra de sortir du lot et de réussir dans la vie. »
La "dictature du look" a un prix
Problème : une opération des paupières, par exemple, coûte 400 euros. « Ce sont mes parents qui paient, confie Mei Li. Ils veulent que je me sente bien. » Résultat : malgré la crise, la chirurgie esthétique est déjà le quatrième poste de dépense des foyers chinois.
Ce business rapporte plus de 2 millions d’euros par an. Et attire toutes sortes de margoulins. L’an dernier, le décès d’une starlette, Wang Bei, sur une table d’opération a jeté une lumière crue sur les pratiques douteuses de certaines cliniques. Le gouvernement souhaite faire le ménage, mais les contrôles sont rares. Dans les magazines ou sur les sites internet pour adolescents, les publicités se multiplient. Elles proposent des opérations à prix cassés, photos de nymphettes en bikini à l’appui. En Chine, la dictature du look a encore de beaux jours devant elle !
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