Audiovisuel algérien : le grand bond en avant
Le monopole d’État, en Algérie, c’est fini. Avec le nouveau code de l’information, chaînes de télévision et stations de radio s’ouvrent aux investisseurs privés.
Après un demi-siècle de monopole d’État et vingt ans de pluralisme dans la presse écrite, l’audiovisuel s’ouvre aux investisseurs privés. Plus qu’une réforme, c’est une petite révolution. Le nouveau code de l’information, qui prévoit également la dépénalisation des délits de presse, s’inscrit dans le cadre des mesures promises par le président Bouteflika le 15 avril dans la foulée des révolutions arabes, et destinées « à la consolidation des pratiques démocratiques ». « Aucune disposition privative de liberté ne sera opposée aux journalistes dans le cadre des affaires liées à leur activité professionnelle », assure le communiqué du Conseil des ministres qui a adopté, le 11 septembre, quatre projets de loi présentés comme un « premier pas dans le processus de réformes politiques profondes » du système algérien.
« Les premières chaînes de télévision et stations de radio privées pourront émettre dès le début 2012 », promet Nacer Mehal, le ministre de la Communication. Après son examen en Conseil des ministres, le projet de loi sera soumis au vote des deux chambres du Parlement, puis promulgué par Abdelaziz Bouteflika. Auparavant, une Haute Autorité de l’audiovisuel sera créée. Sa composition et ses prérogatives feront l’objet d’un décret présidentiel, mais l’on s’attend à une participation paritaire entre l’administration et la corporation.
Problème de contenu
À une écrasante majorité, la classe politique a salué cette ouverture au secteur privé. Seul le Parti des travailleurs (PT) a émis une réserve : son leader, Louisa Hanoune, dit craindre que « cette libéralisation ne profite qu’aux hommes d’affaires et aux barons du secteur informel ». Quant au Rassemblement national démocratique (RND) du Premier ministre Ahmed Ouyahia, il juge nécessaire « la mise en place de garde-fous » pour empêcher que le paysage audiovisuel « ne soit pollué par la diffusion d’images contraires aux valeurs de [la] culture [algérienne] ou par des chaînes dédiées au charlatanisme ». Un risque qui devrait être pris en considération lors de l’élaboration du cahier des charges.
Qui sera le Bouygues algérien ? L’investissement en matière de chaînes de télévision privées représentant des sommes très élevées, seule une poignée d’hommes d’affaires figure sur la liste des potentiels patrons de ces futurs médias. On évoque l’industriel Issad Rebrab (agroalimentaire et grande distribution, près de 1,5 milliard de dollars de chiffre d’affaires en 2010), Ali Haddad (BTP, 800 millions de dollars) ou Djilali Mehri (hôtellerie, Pepsi Algérie, 500 millions de dollars). Du côté des professionnels, les quotidiens arabophone El-Khabar et francophone El-Watan ont annoncé leur intention de déposer leur demande d’agrément dès que la Haute Autorité sera installée. Reste le problème du contenu des programmes dans un pays où les capacités de production audiovisuelle sont faibles. Mais cela, c’est une autre histoire…
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