Kweku Adoboli : le Kerviel de la City ?

Fils d’un fonctionnaire ghanéen de l’ONU à la retraite, ce jeune trader aurait détourné 1,5 milliard d’euros au nez et à la barbe de son employeur, la banque suisse UBS.

Adoboli était entré à UBS comme stagiaire en 2003 avant de devenir courtier en 2006. © D.R.

Adoboli était entré à UBS comme stagiaire en 2003 avant de devenir courtier en 2006. © D.R.

Publié le 22 septembre 2011 Lecture : 3 minutes.

À l’instar des cours des banques européennes, le monde de la finance poursuit sa longue et lente dégringolade. Cette fois, c’est un jeune trader d’origine ghanéenne, Kweku Adoboli, qui a porté la dernière estocade. Soupçonné d’avoir détourné 1,5 milliard d’euros à la suite « d’opérations non autorisées » par son employeur, la première banque suisse, UBS, le jeune homme de 31 ans a été interpellé par la police londonienne le 15 septembre, et une enquête a été ouverte. À peine la nouvelle affaire révélée, l’action UBS plongeait de 10 %.

Fils de John Adoboli, un ancien fonctionnaire de l’ONU à la retraite retourné vivre à Tema, au Ghana, le jeune trader travaille à la City. Installé dans les bureaux londoniens d’UBS, il était, jusque-là – mais cela reste à confirmer –, responsable des transactions sur les ETF (Exchange Traded Funds, ou fonds indiciels cotés) au département banque d’investissement d’UBS. En clair, le trader concoctait des indices sectoriels en agrégeant des valeurs d’un même secteur (automobile, matières premières, pharmacie…) cotées sur plusieurs Bourses.

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Le mystère du "trader fou"

Une enquête interne est en cours pour déterminer comment Kweku Adoboli a pu réaliser « des transactions illégales » au nez et à la barbe du bataillon de contrôleurs d’UBS. Déjà surnommé par la presse suisse « le trader fou », il travaillait dans un service baptisé Delta One, qui aurait donc caché un barbouze de la finance.

Grand bosseur, fêtard, aimant le champagne et les jolies filles.

Selon sa page Facebook, le jeune Ghanéen est un passionné de photographie. « Grand bosseur, fêtard, aimant le champagne et les jolies filles », écrit de son côté le Daily Mail, il habite un appartement luxueux à Whitechapel, dans l’est de Londres. D’après le quotidien britannique, il gagnerait 200 000 livres (230 000 euros) par an, mais ses revenus pouvaient dépasser 400 000 livres avec les bonus. Formé à l’informatique et au management à l’Université de Nottingham, après avoir fait des études secondaires dans une école privée près de Leeds, il avait rejoint UBS comme stagiaire en 2003, avant de devenir trader à partir de 2006, si l’on en croit son profil sur le réseau professionnel LinkedIn.

Mais après son arrestation, l’homme a aussi disparu des radars du web. Sa page Wikipedia a été supprimée le 15 septembre à 23 h 14. Désactivées, ses pages LinkedIn et surtout Facebook laissent ses 417 « amis » sans nouvelles. Il leur avait lancé un message prémonitoire peu avant son arrestation : « I need a miracle. »

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Mais le miracle n’a pas eu lieu. Kweku Adoboli rejoint par la grande porte l’équipe des traders indélicats pris la main dans le sac. Il se glisse juste derrière le Japonais Yasuo Hamanaka, qui avait soutiré 2,6 milliards de dollars à la banque Sumitomo, en 1996, et loin de l’intouchable Jérôme Kerviel, qui avait fait perdre 4,9 milliards d’euros à la Société générale, en janvier 2008. Le trader français a été condamné en 2010 à rembourser cette perte colossale…

Gros coup dur

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« Nous avons le cœur brisé, la fraude ne fait pas partie de nos valeurs. Nous sommes une famille respectable et travaillant dur, comme Kweku », a déclaré John Adoboli à l’Association de la presse britannique. Pas sûr que cela émeuve UBS, qui n’est pas près de passer l’éponge : l’entourloupe du trader plongera la banque dans le rouge le trimestre prochain, un gros coup dur.

Sauvé par l’État, le groupe suisse avait failli sombrer en 2008 à cause de la crise des subprimes. Depuis, il a été délesté de plusieurs milliards de dollars avec l’affaire Madoff et a perdu la confiance de 4 450 de ses clients, dont il a communiqué l’identité au fisc américain après avoir réglé une amende de 780 millions de dollars. UBS pensait rebondir en 2011. C’est raté.

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