Afrique : multinationales sous pression

Soucieux de se mettre à l’abri du moindre incident, les grands groupes promeuvent la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) à travers leurs filiales locales. Le fait qu’ils soient particulièrement exposés à l’opinion publique n’y est pas étranger.

Les multinationales recourent à l’audit externe pour évaluer l’impact global de leurs actions. © AFP

Les multinationales recourent à l’audit externe pour évaluer l’impact global de leurs actions. © AFP

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Publié le 22 septembre 2011 Lecture : 3 minutes.

Enquête : entreprises responsables, des paroles aux actes
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Enquête : entreprises responsables, des paroles aux actes

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Ebranlées par un certain nombre de scandales, les multinationales ont à cœur, depuis une dizaine d’années, d’améliorer leur image. La responsabilité sociétale des entreprises (RSE) a pris une tournure décisive en 1997 : la célèbre marque de sport Nike avait alors été accusée d’inciter le travail des enfants, notamment au Pakistan, où ceux-ci cousaient, du matin au soir, des ballons de football. Le célèbre patron américain Phil Knight, pour sauver l’image de son entreprise, lança le programme Transparency 101, à travers lequel il s’engageait à publier les rapports du cabinet PricewaterhouseCoopers sur tous ses sous-traitants.

En Afrique, ce sont aujourd’hui les industries extractives qui sont en première ligne : pour la plupart cotées en Bourse, elles tentent de se mettre à l’abri du moindre incident. Manoelle Lepoutre, directrice développement durable et environnement chez Total, explique : « Depuis 2003, nous avons recours à un auditeur externe qui évalue nos actions mises en œuvre dans les domaines de la sécurité, du social et de l’environnement. »

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Rapport annuel, programme de réduction des diverses pollutions pouvant être générées par l’activité du groupe, annonces par le PDG Christophe de Margerie d’un plan d’audit des plateformes au large des côtes africaines… Le pétrolier français entend ne rien laisser au hasard. Il cherche en outre à s’appuyer sur les ONG pour mener à bien des programmes sociaux auprès des populations – programmes pour lesquels il a déjà dépensé 265,8 millions d’euros en 2010. « On se base d’abord sur la réglementation locale, puis on construit des objectifs en interne. Par exemple, nous nous étions fixés, en 2005, de ramener nos rejets d’hydrocarbures en off­shore en dessous de 30 mg par litre d’eau d’ici à 2010… Objectif atteint », illustre Manoelle Lepoutre.

Prise de conscience

Visées constamment par les organisations de défense des droits de l’homme et de l’environnement, les entreprises chinoises ont elles aussi bien compris que, si elles voulaient continuer à travailler sereinement en Afrique, elles devaient être plus transparentes et s’appliquer un minimum de contraintes. Un rapport publié fin 2010 par le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), l’Agence française de développement (AFD) et l’Université de commerce international et d’économie (UIBE, Pékin) met ainsi en exergue des pratiques qui s’améliorent et une vraie prise de conscience au sein de la China National Petroleum Corporation (CNPC).

L’étude de cas porte sur ses activités au Tchad, au Niger et au Soudan. « Depuis la conception de son premier système HSE [hygiène, sécurité, environnement, NDLR] en 1997, CNPC cherche continuellement à le faire évoluer et à le mettre au niveau des standards internationaux », relèvent les auteurs. Surtout, la compagnie n’avait, jusqu’à récemment, pas su communiquer sur ses actions, s’attirant régulièrement les foudres de la communauté internationale. Pékin prévoit d’adopter d’ici à 2013 un code RSE.

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De même, les grandes entreprises des technologies de l’information et de la communication, de par leur visibilité, sont vigilantes. « La RSE fait partie intégrante de notre business », assure Ntutule Tshenye, directeur RSE de Samsung Afrique. Depuis 2010, le fabricant de téléphones a lancé un programme de coordination de ses actions au sein de ses différentes filiales sur le continent. Étalé sur cinq ans, il mobilisera près de 100 millions d’euros. « Ce chiffre est en lien avec nos objectifs de performance, explique Ntutule Tshenye. Le principe est simple : plus nous sommes profitables, meilleurs doivent être nos investissements. » Le groupe coréen, qui se dit en outre responsable de tous ses partenaires, semble confirmer un phénomène largement observé : en matière de RSE, ce sont les entreprises les plus visibles qui ont tendance à aller le plus loin.

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