Maroc : le diable et le code de la route

Le recours à des alcootests pour diminuer le nombre des accidents de la circulation n’a pas l’heur de plaire aux islamistes. Notre collaborateur Fouad Laroui leur répond sobrement mais fermement !

Au Maroc, la gendarmerie royale sera équipée d’alcootests. © AFP

Au Maroc, la gendarmerie royale sera équipée d’alcootests. © AFP

Fouad Laroui © DR

Publié le 12 septembre 2011 Lecture : 2 minutes.

Le nouveau code de la route adopté au Maroc a donné lieu à un festival de mauvaise foi sur certains sites internet. Il s’agit de ces sites animés par des types dont la devise semble être : « Il n’y a que moi qui suis proche de Dieu, vous êtes tous des mécréants. »

C’est ainsi que l’un d’eux estime que ce nouveau code est l’œuvre du diable. Suivez le raisonnement, il vaut le détour : « Dès septembre, fulmine le site, la gendarmerie royale sera équipée d’alcootests. Tout conducteur ayant un taux d’alcool supérieur à 0,2 g par litre de sang se verra verbalisé. On peut donc en déduire que les automobilistes ayant un taux d’alcool inférieur à 0,2 g seront épargnés. » Ah, ce « épargnés »… Tant de regrets dans ce terme… On imagine la vision idéale qui se forme dans l’esprit du taliban internaute : des gardiens de la vertu se tenant quelques pas derrière les gendarmes, prêts à n’épargner personne, prêts à fouetter tous ces impies. Et pourquoi pas des pelotons d’exécution ? Au moins, cela résoudrait le problème démographique.

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Taux zéro

Ce raisonnement bizarre signifie en gros que toute mesure qui va dans le bon sens est inepte tant qu’elle n’atteint pas la limite extrême. Il aurait été plus intelligent d’applaudir l’introduction de l’alcootest et ensuite de s’interroger sur le taux à partir duquel on est en infraction. Après tout, la Suède a abaissé progressivement ce taux jusqu’à zéro sans traiter personne de diable. C’est bien ce qui ne va pas au Maroc : il semble impossible de mener une discussion sans faire intervenir le ciel et les enfers. Comme s’il n’y avait pas assez de problèmes sur la terre des vaches.

Un de ces problèmes, c’est justement le fait que les accidents de la route tuent chaque année plus de 4 000 personnes et coûtent à l’État plus de 1 milliard d’euros. Cela ne semble pas trop émouvoir nos salafis. Non : c’est l’introduction de l’alcootest qui mobilise leur fureur. On peut être pour le taux zéro, comme en Suède, mais sans faire de cette question pratique une occasion d’anathème, d’excommunication, de takfir. Sinon, allons jusqu’au bout du salafisme : puisqu’il n’y avait pas d’automobiles à Médine ou à La Mecque il y a quatorze siècles, pourquoi ne pas carrément les interdire ?

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