Liberia : Firestone se refait une santé et soigne son image

Dévastée par les récoltes clandestines pendant la guerre du Liberia, l’immense plantation de Harbel a de nouveau le vent en poupe. En butte aux critiques, le géant américain du pneu y a amélioré les conditions de vie et de travail de ses salariés.

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Publié le 20 août 2011 Lecture : 3 minutes.

Liberia : chronique d’un retour annoncé
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Liberia : chronique d’un retour annoncé

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À 60 km à l’est de Monrovia, la plantation d’hévéas de Harbel – 76 000 ha – est la plus grande du monde. Concession du géant américain des pneumatiques Firestone, elle est aussi, avec ses 7 000 salariés, le premier employeur du pays. Elle symbolise à la fois le potentiel agro-industriel du Liberia et les liens économiques qui l’unissent à son « grand frère » américain.

Depuis sa fondation, en 1926, la plantation alimente en caoutchouc les usines de pneus du Tennessee, de l’Illinois et de l’Oklahoma. Le précieux liquide blanc de Harbel est, aujourd’hui comme hier, récolté en saignant le tronc de l’hévéa, puis conditionné et embarqué à Monrovia à destination des États-Unis. Même si, depuis 1988, Firestone est devenu une filiale du japonais Bridgestone.

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Valorisation

Pendant la guerre civile, de 1989 à 2003, les récoltants clandestins ont gravement endommagé l’exploitation. « Un hévéa mal saigné risque de voir sa durée de vie réduite à dix ans, alors qu’il peut normalement produire trente années durant », déplore Carlos Wallace Smith, responsable de la communication de Firestone Liberia. Du coup, depuis 2004, Firestone s’est lancé dans un vaste programme de plantation de 2 000 ha et entreprend de valoriser au mieux les arbres qu’il doit abattre, en produisant du charbon de bois ou des planches.

Le groupe a également dû investir sur le plan social, l’état pitoyable des logements des travailleurs et les pénibles conditions de travail ayant été dénoncés par plusieurs articles de la presse internationale. Des accusations qui ont même fait l’objet d’une plainte pour travail forcé et travail des enfants, déposée en 2005 aux États-Unis par un collectif d’ONG emmené par l’association libérienne Save My Future Foundation (Samfu).

Les saigneurs du latex

Avec une production estimée à 157 000 tonnes en 2010, le Liberia est le premier fabricant et le premier exportateur de caoutchouc naturel en Afrique, devant la Côte d’Ivoire (126 000 t) et le Nigeria (89 000 t). Si sa production a doublé par rapport aux plus dures années de guerre (1989-1990), le petit pays ouest-africain n’arrive qu’au septième rang mondial des producteurs de latex, loin derrière les deux mastodontes asiatiques du secteur : la Thaïlande (2,2 millions de t) et l’Indonésie (2,1 million de tonnes).

Le caoutchouc a rapporté 86 millions de dollars (60 millions d’euros) au Liberia en 2009, soit plus de 60 % de ses recettes d’exportation. Une manne qui devrait grossir, compte tenu de la hausse des cours, qui ont augmenté de 70 % entre juillet 2009 et juillet 2011 et qui devraient rester élevés ces prochaines années en raison de la forte demande chinoise, même si les fabricants de pneumatiques utilisent de plus en plus de caoutchoucs synthétiques.

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Depuis, l’entreprise a redoré son blason et affirme prendre soin de ses tappers (« saigneurs »). « Nous avons dû nous battre, mais il est indiscutable que Firestone a fait des efforts, se félicite James Makor, directeur de Samfu. De nouveaux logements ont été construits pour les salariés, l’hôpital a été rénové et, surtout, la société a investi dans la construction d’établissements d’enseignement secondaire, alors qu’il n’y avait jusqu’alors que des écoles primaires, ce qui encourageait le travail des enfants. Sur ce point, elle a aussi mis en place une politique drastique, licenciant immédiatement tout travailleur emmenant son fils dans la plantation. » Pour James Makor, ces progrès ont été facilités par l’action de sensibilisation et la mobilisation des services de l’État, qui ont mis la pression sur l’entreprise à l’occasion du renouvellement de sa concession en 2007, mais aussi des clients internationaux comme Ferrari.

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Pour le fabricant de pneus, ces investissements dans les infrastructures communautaires – plus de 69 millions d’euros depuis 2005 – en valaient le coût. « Cette plantation offre l’une des meilleures qualités de caoutchouc au monde, obtenue grâce à près d’un siècle de sélection et de croisement de différentes espèces d’hévéas », explique Carlos Wallace Smith. Aujourd’hui, la production n’a pas encore atteint son niveau d’avant-guerre – un hévéa met sept ans avant d’entrer en exploitation –, mais la plantation de Harbel a encore de beaux jours devant elle.

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