Nationalisme européen : la couleur de la peur
Elle rejette l’immigration, l’islam et la mondialisation… La droite populiste et xénophobe progresse (presque) partout en Europe.
Le 23 juillet, au lendemain des attentats qui ont endeuillé la Norvège, une nouvelle loi interdisant le port du niqab est entrée en vigueur en Belgique. C’est le dernier exemple en date de la surenchère à laquelle se livrent les responsables européens pour apaiser les craintes des électeurs qui redoutent de voir leur culture submergée par l’immigration musulmane et l’islam. Mais si l’objectif de ces politiciens est d’affaiblir l’extrême droite en lui empruntant une partie de sa rhétorique, la traduction électorale de cette stratégie est très mitigée.
La Belgique compte 640 000 musulmans, soit environ 6 % de sa population. Quelques centaines de femmes tout au plus portent le voile. Pourtant, tous les partis représentés au Parlement ont approuvé la loi contre le niqab (une seule voix contre et deux abstentions). La Belgique est, après la France, le second pays de l’Union européenne à prohiber le voile intégral.
Les Suisses ont, en 2009, interdit par référendum la construction de nouveaux minarets. En Allemagne, Thilo Sarrazin, un ancien membre du directoire de la Bundesbank, a suscité une polémique en 2010 dans un best-seller décrivant une identité allemande menacée par l’immigration musulmane. Cette même année, David Cameron, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy ont déclaré que la politique d’intégration était un échec.
Opinion sous influence
Tous savent que le discours de l’extrême droite a un impact profond dans l’opinion. Les Européens les plus qualifiés ont tendance à apprécier la diversité culturelle et à comprendre les avantages économiques que représente l’immigration – dont l’Europe, avec l’allongement de la durée de la vie et sa faible natalité, aura grand besoin dans les prochaines décennies. Les moins qualifiés considèrent plutôt les immigrés comme des concurrents sur le marché du travail. Autre facteur qui favorise la poussée de l’extrême droite : la mondialisation, accusée d’être néfaste pour l’emploi et de tirer les salaires vers le bas.
Les partis populistes, xénophobes et anti-islamiques sont aujourd’hui représentés dans plusieurs Parlements, de la Belgique aux Pays-Bas en passant par l’Italie, la Finlande, la Suède et la Suisse (voir carte ci-dessus). C’est le principal changement dans le paysage politique européen depuis l’effondrement du communisme (1989-1991). Ils ne semblent en mesure de conquérir le pouvoir nulle part, mais, dans de nombreux pays, ils se sont indéniablement enracinés en tant que force parlementaire.
© The Financial Times et Jeune Afrique
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