Analyse : l’Europe désunie

L’Afrique, ainsi que toutes les régions du monde qui tentent de se regrouper pour déboucher – un jour – sur des « Unions » qui feront la force, doivent tirer la leçon des déboires de l’Europe.

Depuis 1956, l’Union européenne (UE) n’a cessé de croître. Le nombre de ses membres est passé de six à vingt-sept. Elle s’est dotée d’une capitale, Bruxelles ; d’un gouvernement, la Commission ; d’un budget et d’une politique agricole. Elle a démantelé ses frontières intérieures et jouit d’une monnaie, l’euro, la deuxième après le dollar.

Pourtant, voici ce modèle gravement malade. Depuis un an et demi, l’UE ne parvient pas à persuader les financiers que les déficits grec, irlandais, espagnol et portugais ne dégénéreront pas en faillites. Les centaines de milliards d’euros promises par les États européens pour boucher les trous se révèlent à chaque fois insuffisantes, parce que le problème de l’Europe n’est pas sa dette, mais son manque de solidarité.

Les opinions publiques des pays en bonne santé, comme l’Allemagne ou les Pays-Bas, ne veulent plus payer pour les fautes des Grecs, qui fraudent le fisc et profitent de longues vacances que ne justifie en rien leur faible productivité.

Quand un membre d’une famille se rend malade, par exemple par ses excès d’alcool, ou est réduit à la misère par sa manie du jeu, le reste de la fratrie se porte à son secours… avant de le punir éventuellement pour son intempérance. Et les banquiers de se dire : « Nous pouvons prêter à cette personne en toute confiance, puisque les siens sont derrière elle. »

En faisant passer la morale et leur égoïsme avant la solidarité, les États « puritains » signifient que les « vilains petits canards » européens sont vulnérables, car l’UE n’est pas une vraie union. Celle-ci ne pourra être scellée que par des abandons de souveraineté de ses membres, qui feront définitivement passer le bien collectif avant leurs intérêts particuliers, si respectables soient-ils.