« Qui sert bien son pays n’a pas besoin d’aïeux ! »

Conseiller à l’Assemblée des Français de l’étranger pour la circonscription de Dakar

Publié le 4 août 2011 Lecture : 2 minutes.

Monsieur le Premier ministre François Fillon,

Les Français binationaux, qu’ils soient établis à l’étranger (ils sont près de 1 million) ou dans l’Hexagone, se sentent aussi concernés qu’Eva Joly par vos récentes déclarations. Ils doivent se demander avec inquiétude s’ils ont suffisamment assimilé les valeurs et la culture françaises, et – pour tout dire – s’ils sont assez français.

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Je voudrais les rassurer et leur dire que notre Constitution stipule que tous les Français sont égaux en droits et en devoirs, et ne prévoit ni période probatoire, ni délai de carence, ni tests d’évaluation de la connaissance des valeurs, de la langue et de la culture françaises. Au demeurant, si par extraordinaire de tels tests devaient un jour être exigés, je ne suis pas sûr que les plus mal notés soient forcément ceux que l’on croit…

Monsieur le Premier ministre, vous avez certainement en mémoire les noms des femmes et des hommes d’origine étrangère qui font honneur à la France : Curie, Zola, Thomas Paine, Troyat, Senghor, Houphouët-Boigny, Félix Éboué, dans le passé ; François Cheng, Assia Djebar, Amine Maalouf, Max Gallo et tant d’autres aujourd’hui.

Depuis Clovis, c’est ainsi que s’est construite la France : par apports successifs et fécondants, pour aboutir à cette belle nation dont la plus belle définition me semble être : « un commun vouloir de vie commune », formule empruntée à Léopold Sédar Senghor, président-poète, académicien et binational franco-sénégalais. « La France, c’est tous les Français », disait quant à lui le général de Gaulle, dont chacun se souvient de l’exigence sourcilleuse à ce sujet.

Tout cela, vous le saviez, mais l’occasion était sans doute trop belle, à dix mois de l’élection présidentielle, d’aller à la pêche aux voix de l’extrême droite. Le pis est que cela s’est fait à l’étranger, en terre africaine, où vivent de nombreux binationaux. Après le discours de Dakar, c’était une maladresse de plus.

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On peut, comme moi, ne pas être d’accord avec l’idée d’Eva Joly de remplacer les défilés militaires par des défilés citoyens, mais nul ne peut lui dénier le droit d’exprimer une opinion et, surtout, se permettre, s’il ne la partage pas, d’évoquer ses origines au lieu de lui répondre sur le fond. Le « virus des origines » a ceci de pernicieux qu’une fois contracté il fait confondre les origines et la nationalité. On n’ose imaginer les conséquences d’une telle épidémie sociale si elle devait se propager. Mais laissons le dernier mot à Voltaire : « Qui sert bien son pays n’a pas besoin d’aïeux. »

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